Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/437

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seul éternel, le mauvais, qui est une de ses créatures, n’est tombé que par orgueil. Cette différence se retrouve dans la manière de concevoir l’origine du monde et celle des âmes. D’après le dualisme absolu, c’est le principe mauvais qui a créé la matière, le bon n’a créé que les esprits ; une partie de ceux-ci furent entraînés sur la terre et enfermés dans des corps ; Dieu consent à ce qu’ils y fassent pénitence et qu’ils passent, de génération en génération, d’un corps à un autre jusqu’à ce qu’ils arrivent au salut. Le dualisme mitigé admet que Dieu est le créateur de la matière, mais que le principe mauvais en est le formateur ; les âmes ne sont pas venues sur la terre toutes à la fois ; issues d’un premier couple, elles se multiplient comme l’enseignait l’ancien traducianisme. Pour tout le reste, les cathares des deux partis professent les mêmes doctrines. Le principe mauvais a imposé aux hommes la loi mosaïque, pour les retenir dans la servitude ; d’où il suit qu’il faut rejeter l’Ancien Testament. Dieu voulant sauver les hommes de ce joug, leur envoie un esprit supérieur qui, ne pouvant entrer en contact avec la matière, ne prend que l’apparence d’un corps humain. La matière est la cause et le siège du mal ; tout rapport volontaire avec elle devient une souillure ; cette doctrine a pour conséquence pratique un ascétisme très rigoureux. Le pardon des péchés s’obtient par l’admission dans l’église des cathares, moyennant le baptême du Saint-Esprit, lequel est symbolisé par l’imposition des mains ; cet acte s’appelait consolamentum, parce qu’il devait faire descendre sur l’homme l’esprit consolateur. Avant de le recevoir, il fallait avoir donné des gages de fidélité et s’être soumis à un jeûne de plusieurs jours. Ceux qui l’avaient reçu étaient appelés les parfaits ; en France le peuple les qualifiait de bons hommes, de bons chrétiens par excellence. Ils renonçaient au mariage et à toute propriété, ne se nourrissaient que de pain, de légumes, de fruits, de poissons, voyageaient pour visiter les fidèles, avaient entre eux des signes secrets de reconnaissance, pouvaient enseigner la doctrine et donner le consolamentum. Les femmes parfaites avaient les mêmes obligations et les mêmes droits.

Ceux qui n’étaient pas parfaits formaient la classe des