Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/526

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dive. — Que les artistes du moyen âge aient cherché à faire prédominer l’expression, le sentiment moral sur la forme plastique, ce n’est pas douteux, et c’est en grande partie ce qui constitue leur originalité ; mais ce sentiment moral, empreint sur les physionomies, dans les gestes, est plutôt énergique que maladif. Les statues qui décorent la façade de la maison des Musiciens, à Reims, sont très vivantes. Les bas-reliefs placés dans les tympans de l’arcature de la porte de la Vierge, à la façade occidentale de Notre-Dame de Paris, n’ont aucune raideur archaïque ; ils ne sont point grêles ; ils peuvent rivaliser avec les plus belles œuvres de l’antiquité.

C’est à rendre l’harmonie entre l’intelligence et son enveloppe que la belle école du moyen âge s’est particulièrement attachée. Chaque statue a son caractère personnel qui reste gravé dans la mémoire comme le souvenir d’un être vivant qu’on a connu. Une grande partie des statues des porches de Notre-Dame de Chartres, des portails des cathédrales d’Amiens et de Reims, possèdent ces qualités individuelles ; et c’est ce qui explique pourquoi ces statues produisent sur la foule une si vive impression qu’elle les nomme, les connaît et attache à chacune d’elles une idée ou même une légende. Telle est, entre autres, la belle statue de la Vierge de la porte nord du transept de Notre-Dame de Paris. C’est une dame de bonne maison ; l’intelligence, l’énergie tempérée par la finesse des traits, ressortent sur cette figure délicatement modelée. C’est une physionomie toute française, qui respire la franchise, la grâce audacieuse et la netteté du jugement. L’auteur inconnu de cette statue voyait juste et bien, savait tirer parti de ce qu’il voyait, et cherchait son idéal dans ce qui l’entourait. D’ailleurs, habile praticien — car rien ne surpasse l’exécution des bonnes figures de cette époque — son ciseau docile savait atteindre les délicatesses du modelé le plus savant. Il faut citer encore, parmi les bons ouvrages de statuaire du milieu du XIIIe siècle, quelques figures tombales des églises abbatiales de Saint-Denis, de Royaumont, les apôtres de la Sainte-Chapelle du Palais, à Paris, certaines statues du portail occidental de Notre-Dame de Reims, des porches de Notre-Dame de Chartres et des portes de la cathédrale de Strasbourg. Toutefois, sous le règne de