Page:Langlois - Histoire du moyen âge, 1901.djvu/525

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Chartres, etc.), furent autant de chantiers et d’écoles pour les architectes, imagiers, peintres et sculpteurs. Dès les premières années du XIIIe siècle, la façade occidentale de Notre-Dame de Paris s’élevait. A la mort de Philippe Auguste, c’est-à-dire en 1223, elle était construite jusqu’au-dessus de la rose. Donc — toutes les sculptures et tailles étant terminées avant la pose — les trois portes de cette façade étaient montées en 1220. Celle de droite, dite de Sainte-Anne, est en partie refaite avec des sculptures du XIIe siècle, mais celle de gauche, dite porte de la Vierge, est une composition complète et l’une des meilleures de cette époque. Les auteurs de cette statuaire ont évidemment abandonné les traditions byzantines ; ils ont étudié la nature ; ils ont atteint un idéal qui leur est propre. Leur faire est large, simple, presque insaisissable, comme celui des belles œuvres grecques. C’est la même sobriété des moyens, le même sacrifice des détails, la même souplesse et la même fermeté dans la façon de modeler les nus dans ces pierres de liais, serrées et choisies, dont la dureté égale presque celle du marbre de Paros. Non seulement l’expression des têtes est très noble, mais la composition est excellente. Le bas-relief de la mort de la Vierge, celui du couronnement de la mère du Christ, sont des scènes admirablement entendues comme effet dramatique et comme agencement de lignes. La statuaire de l’Ile-de-France — cette Attique du moyen âge — est remarquable d’ailleurs par un sentiment dramatique qui ne se retrouve pas au même degré dans les autres écoles provinciales. Voyez, par exemple, les voussures de la porte centrale de Notre-Dame de Paris, l’expression terrible des damnés, la béatitude et le calme des élus. Les artistes qui ont sculpté ces voussures, les Prophéties et les Vices du portail de la cathédrale d’Amiens, les bas-reliefs des porches de Notre-Dame de Chartres, avaient des idées et prenaient le plus court chemin pour les exprimer ; aussi atteignaient-ils souvent, comme les Grecs, la véritable grandeur.

On a longtemps admis que les statuaires du moyen âge n’avaient su faire que des figures allongées, sortes de gaînes drapées en tuyaux d’orgues, corps grêles, sans vie et sans mouvement, terminés par des têtes à l’expression ascétique et mala-