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l’élément historique

alors son rôle, comme celui de Guillaume, et pour la même raison chronologique, ne peut être que légendaire ; ou bien il représente tout autre personnage historique ou imaginaire, duquel on ne sait rien.

Si, au contraire, on étudie de près le troisième personnage, celui qui porte le nom de Guaifier et le titre de roi, on arrive à un résultat tout différent.

Ce nom de Guaifier est peu commun dans l’histoire ; on ne connaît guère que le duc d’Aquitaine, plus souvent appelé Waïfre, qui suscita tant de difficultés à Pépin le Bref et dont le roi n’eut raison qu’en le faisant assassiner, en 768, et Guaifier, prince de Salerne, qui consuma la plus grande partie de sa vie en guerres contre ses voisins et contre les Musulmans[1]. Il est clair que le premier n’est pas le héros de notre chanson. Dans l’histoire du second on trouve un épisode qui pourrait bien avoir été la première inspiration du poème. C’est le siège de Salerne par les Sarrasins, de 871 à 873. La Chronique anonyme de Salerne le raconte en détail[2].

Trente mille Arabes, sous la conduite du roi Abd-Allah, ayant débarqué en Calabre, vinrent dresser leurs tentes autour de Salerne, dévastant tous les environs, pillant Bénévent, Naples, Capoue. Le prince de Salerne, Guaifier, prévenu à temps de l’arrivée prochaine des infidèles, s’était préparé à la résistance. Aidé par les Capouans et les Toscans, il avait réparé les murs de sa ville et les avait flanqués

  1. Je laisse naturellement de côté Benoît Guaifier, poète théologien, moine du Mont Cassin au xie siècle.
  2. Pertz, Mon. Germ. hist., Script. III, 528-533.