Page:Langlois - Rig Véda.djvu/179

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
[Lect. VI.]
171
RIG-VÉDA. — SECTION DEUXIÈME.


7. Tes chevaux, excités par nos libations, ont henni en sentant le beurre consacré. Indra, la terre leur répond, et prolonge ce bruit. Le nuage, qui marchait, s’est arrêté.

8. Le nuage se tient (dans l’air) comme attentif ; puis, répondant à la voix des (ondes qui sont ses) mères, il se remet en marche. Cependant les (Marouts) ont porté sur la plage lointaine la voix d’Indra, et ils en ont multiplié les sons.

9. Le grand Indra, en frappant le nuage endormi, frappe le magicien Vritra. Le ciel et la terre ont frémi de crainte sous le coup retentissant de la foudre du (dieu) généreux.

10. Oui, la foudre du (dieu) généreux a retenti, quand (Indra), ami des hommes, a percé l’ennemi du genre humain. Avide de nos libations, il a détruit les magies de l’imposteur, enfant de Dânou.

11. Bois donc, magnanime Indra, bois notre soma. Que nos libations enivrantes fassent ta joie. Qu’elles emplissent, qu’elles élargissent tes flancs. Qu’elles comblent tous les vœux d’Indra.

12. Indra, puissions-nous avoir une place dans ton cœur ! Les sages veulent t’honorer par une prière convenable. Oui, jaloux d’obtenir ton secours, nous t’adressons cet hommage. Maître de la richesse, nous nous donnons à toi.

13. Nous nous donnons à toi, Indra ; et, désirant ta protection, nous doublons nos offrandes. Ô dieu, accorde-nous cette richesse que nous souhaitons ; qu’elle soit accompagnée d’abondance et de force !

14. Donne-nous une maison, un ami ; donne-nous, Indra, les biens que répandent les robustes Marouts. Car ces Marouts, qui partagent ta joie et ton ivresse, viennent aussi boire le soma présenté (aux dieux).

15. Qu’ils viennent donc, ces compagnons de tes plaisirs ! Indra, bois le soma qui fait ton bonheur et ta force. Deviens notre protecteur au milieu des combats ; et avec les grands et adorables (Marouts) découvre la face du ciel.

16. (Dieu) sauveur, ceux qui se montrent généreux envers toi, ou qui par des hymnes célèbrent tes bienfaits, te préparant sur le cousa une espèce de demeure ; ô Indra, ils sont sûrs de ta protection, et obtiennent l’abondance.

17. Pendant les terribles tricadrous[1], héroïque Indra, bois notre soma avec volupté ; qu’il coule sur ta barbe. Viens, avec tes chevaux azurés, prendre heureusement ta part des libations.

18. Magnanime Indra, affermis cette force avec laquelle tu as terrassé le fils de Dânou, qui s’avançait comme l’araignée. (De ta main droite) révèle la lumière à l’Arya, et de ta main gauche, Indra, terrasse le Dasyou.

19. Nous voulons aussi honorer tes heureux auxiliaires, (les Marouts), qui, avec (toi, que nous aimons à surnommer) Arya[2], ont abattu tout l’orgueil des Dasyous. Par amitié pour Trita[3], tu as détruit ce monstre merveilleux formé par l’art de Twachtri[4].

20. En faveur de ce Trita, qui te charmait par ses libations, tu as sous ta grandeur écrasé Arbouda[5]. Comme le soleil fait rouler son disque, Indra a fait rouler sa foudre[6], et, accompagné des Angiras, il a percé Bala.

21. Ô Indra, que cette riche offrande attire tes bienfaits sur celui qui te chante ! Comble de tes dons ceux qui t’honorent. Ne les afflige pas en leur dérobant une partie de tes faveurs. Puissions-nous, avec force, chanter longtemps encore dans les sacrifices !


HYMNE IV.

À Indra, par Gritsamada.

(Mètre : Trichtoubh.)

1. Le dieu qui est né le premier, et qui, justement honoré, a par ses œuvres orné les autres dieux ; qui, par sa force et sa puissance, fait trembler le ciel et la terre : peuples, c’est Indra[7].

2. Celui qui a consolidé la terre ébranlée, qui

  1. Voy. page 60, col. 2, note 3.
  2. Voy. page 61, col. 2, note 2.
  3. Ce personnage est allégorique, et représente la libation. Voy. page 74, col. 1, note 4 ; page 104, col. 2, note 3.
  4. Je suppose que ce monstre est le nuage orageux où se trouvent accumulés les feux de Twachtri. Le commentaire regarde le mot Twâchtra comme le nom d’un Asoura.
  5. Nom d’un Asoura.
  6. Ce sens me paraît clair. Le mot tchacra, qui veut dire roue, a donné lieu à une légende que j’ai déjà indiquée. On raconte qu’autrefois le char du soleil avait deux roues ; qu’Indra en prit une pour s’en servir comme de sa foudre, et la fit rouler dans l’air.
  7. Pour rendre raison de la composition de cet hymne, qui vraiment n’avait pas besoin de cette explication, le commentaire suppose que, dans un sacrifice où se trouvaient Indra et Gritsamada, les Asouras arrivent avec des intentions hostiles contre Indra, lequel sort de l’enceinte sacrée sous la forme de Gritsamada, et laissait la sienne au Richi. Les Asouras saisissent Gritsamada, le prenant pour Indra ; Gritsamada se défend, et leur apprend ce que c’est qu’Indra.