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journaux de publier la même correspondance, à plusieurs reporters de s’entendre pour laisser faire un compte rendu à un seul d’entre eux. On a alors plusieurs documents, on a même plusieurs affirmations, mais a-t-on autant d’observations ? Évidemment non. Une affirmation qui en reproduit une autre ne constitue pas une observation nouvelle, et quand même une observation serait reproduite par cent auteurs différents, ces cent copies ne représenteraient encore qu’une seule observation. Les compter pour cent équivaudrait à compter pour cent documents cent exemplaires imprimés d’un même livre. Mais le respect des « documents historiques » est parfois plus fort que l’évidence. La même affirmation rédigée dans plusieurs documents séparés, par des auteurs différents, donne l’illusion de plusieurs affirmations ; un même fait relaté dans dix documents différents paraît aussitôt établi par dix observations concordantes. Il faut se défier de cette impression. Une concordance n’est concluante qu’autant que les affirmations concordantes expriment des observations indépendantes l’une de l’autre. Avant de tirer aucune conclusion d’une concordance on doit examiner si elle est une concordance entre des observations indépendantes ; ce qui comporte deux opérations.

1o On commence par chercher si les affirmations sont indépendantes, ou ne sont que des reproductions d’une même observation unique. Ce travail est en partie l’œuvre de la critique externe des sources[1] ; mais la critique des sources n’étudie que les rapports entre les documents écrits, elle s’arrête après avoir établi quels passages un auteur a empruntés à d’autres auteurs. Les passages empruntés sont à écarter sans

  1. Cf. ci-dessus, p. 73.