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Page:Lanne - Le Mystère de Quiberon, 1904.djvu/288

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seul en avant, absorbé dans une rêverie mélancolique, qui contrastait avec l’ivresse accoutumée de la victoire, et que j’attribuai, moins encore aux scènes qui venaient d’affliger ses regards, qu’au pressentiment de celles qui devaient suivre. »


N’y a-t-il pas là de quoi faire rêver ? N’aperçoit-on pas comme un problème psychologique d’une profondeur troublante dans cette succession d’instantanés saisis sur le vif par un témoin oculaire, et qui nous montrent, pendant les diverses péripéties de cette aventure tragique, l’attitude du général en chef en contraste perpétuel avec la physionomie extérieure des événements : triste et chargée de soucis au milieu des acclamations des soldats prêts au combat ; débordante de gaîté nerveuse en face d’un contre-temps qui peut faire tout manquer ; et de nouveau assombrie au moment du triomphe ?

On arriva au fort Penthièvre vers une heure. Tout le monde était à jeun. Les soldats et les officiers républicains partagèrent fraternellement leurs maigres rations avec leurs captifs. Et, instantanément, entre les vainqueurs et les vaincus, s’établirent des rapports de cordialité, d’obligeance, qui se continuèrent jusqu’à la fin. C’est un fait très remarquable, qui a été constaté par tous les contemporains indistinctement et dont on ne voit pas d’autre exemple, ni avant, ni après, dans l’histoire de cette guerre civile. À chacun d’en tirer les inductions qu’il comporte.

Des détachements avaient été chargés de fouiller la presqu’île et de ramasser tous les individus étrangers à la population locale. Il s’en trouva près de dix mille, femmes, enfants, vieillards.