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LIVRE XIII.

différence à la même cause par laquelle il avait expliqué le retard de la plus haute mer sur l’instant de la syzygie, savoir au mouvement d’oscillation de la mer, qui, suivant lui, reporte une grande partie de la marée du soir sur la haute mer suivante du matin et rend ces deux marées presque égales. Mais la théorie des ondulations de la mer fait voir encore que cette explication n’est pas exacte et que, sans les circonstances accessoires, les deux marées consécutives ne seraient égales que dans le cas où la mer aurait partout la même profondeur.

Newton, dans les éditions suivantes de son Ouvrage, n’a presque rien ajouté à sa théorie du flux et du reflux de la mer, exposée dans la première ; seulement il a eu égard, dans le calcul de l’action de la Lune, au changement de la distance lunaire, produit par l’inégalité de la variation. La plus haute mer suivant d’un jour et demi l’instant de la syzygie, il a cru que dans le calcul du maximum de la marée l’action du Soleil devait être multipliée par le cosinus du double du mouvement synodique de la Lune pendant cet intervalle. Mais cette correction est fautive, parce que la marée dans un port n’est pas le résultat de l’action immédiate des astres, mais celui de leur action antérieure d’un jour et demi. On peut assimiler ces marées à celles qui, étant dues à l’action immédiate des astres, emploieraient un jour et demi à parvenir dans le port.

En 1738, l’Académie des Sciences proposa la cause du flux et du reflux de la mer pour le sujet du prix de Mathématiques qu’elle décerna en 1740. Quatre pièces furent couronnées : les trois premières, fondées sur le principe de la pesanteur universelle, étaient de Daniel Bernoulli, d’Euler et de Maclaurin. Le jésuite Cavalleri, auteur de la quatrième, avait adopté le système des tourbillons. Ce fut le dernier honneur rendu à ce système par l’Académie, qui se remplissait alors de jeunes géomètres dont les heureux travaux devaient contribuer si puissamment aux progrès de la Mécanique céleste.

Les pièces qui ont pour base la loi de la pesanteur universelle sont des développements de la théorie de Newton : elles s’appuient non-seulement sur cette loi, mais encore sur l’hypothèse adoptée par ce grand