Page:Laprade - Les Voix du silence, 1865.djvu/100

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Sur un tertre moussu d’où filtre une fontaine,
Les pieds scellés au roc par une étroite chaîne,
Une femme est debout, presqu’enfant, et se tord
Dans les convulsions d’un impuissant effort.
Trois nains velus, dont l’arc a pour flèche une aiguille,
De mille et mille traits percent la pauvre fille ;
Et six dogues affreux, noirs, hérissés, grondants,
Sont découplés contr’elle et lui montrent les dents.
Sa mort est sûre, horrible. Une méchante fée,
Sur un dragon assise et de serpents coiffée,
Mélusine, ivre, heureuse au spectacle du mal,
Excite encor les chiens de son rire infernal.
L’enfant est du village, elle a jupon de bure ;
Sa coiffe de linon cache un peu sa figure ;
Ses bras et ses pieds nus, son cou brun et vermeil
Ont reçu largement les baisers du soleil ;
Pour seul bijou, formant sa parure discrète,
Un rosaire de buis pend sur sa gorgerette.