Page:Laprade - Les Voix du silence, 1865.djvu/196

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Une eau gazouille et fuit ; un vent de bon augure,
Plein de vagues senteurs fraîchit sur ma figure.
Des bruits confus, d’où perce un chant rapide et clair,
Viennent à nous d’en haut avec les flots de l’air.
Tout part de ce sommet, tout ce qui se sent vivre,
Et la voix qui me berce et l’odeur qui m’enivre.
Tout semble avoir là-haut son asile caché,
Les pinsons, le chevreuil qui passe effarouché,
L’insecte qui s’envole à mes pieds de la mousse.
Moi, je suis ce courant qui m’attire et me pousse,
Repris par la jeunesse et l’instinct d’autrefois,
Je marche allègrement, car j’ai senti les bois.
Cinq coureurs inégaux, dont la gaîté me gagne,
Bondissent près de moi, vrais fils de la montagne.
L’aîné, déjà, me prête une robuste main ;
La mienne au plus petit allège le chemin,
Et, tous, joyeux, grimpants, chantants, roulés dans l’herbe,
Nous allons par les fleurs, et chacun fait sa gerbe.