Page:Laprade - Les Voix du silence, 1865.djvu/276

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Vit longtemps à ses pieds, défendu par les bois,
Mourir les flots changeants des vainqueurs et des lois.
Seul avec ses taureaux, libre sur la montagne,
Bravant de père en fils César ou Charlemagne,
Il craignait, seulement, de voir le ciel tomber.

Le baptême a touché son front sans le courber.
Hier, il allait encor, l’âpre et morne druide,
Adorer des forêts l’obscurité fluide ;
La lune, aux temps marqués, l’a vu, naguère encor,
Trancher le gui du chêne avec la serpe d’or,
Et, d’un vase empourpré, répandre avec mystère
Une libation sur le dolmen austère.
Jamais d’un autre temple il n’a franchi le seuil,
Et de son dieu farouche humilié l’orgueil.
Jamais il n’a dormi dans les murs de nos villes ;
Ces splendides prisons lui semblaient choses viles.
Dans son libre désert, il n’accepta de frein