Page:Larousse - Grand dictionnaire universel du XIXe siècle - Tome 10, part. 3, Lu-Marc.djvu/368

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

semble très-difficile de rattacher au plan général de l’organisation florale des monocotylédonées. (Duchartre.)

— Encycl. Les marantes sont de très-beaux et de très-curieux, végétaux de l’Asie et surtout de l’Amérique tropicale. Ils ont un rhizome plus ou moins développé, dont le tissu est très-riche en fécule ; une tige herbacée, terminée par des fleurs disposées en épis ou en grappes et dont la structure bizarre a dès longtemps frappé l’attention des botanistes. À ces fleurs succèdent des ovaires adhérents ou infères, creusés d’une seule loge et surmontés d’un style recourbé et embrassé par le filet pétaloïde qui l’entoure comme une gaine ; le fruit est charnu et renferme une seule graine dure et rugueuse. L’espèce la plus intéressante du genre est la marante à feuilles de balisier (maranta arundinacea), qui est l’objet d’une culture importante aux Antilles, à l’Île de France et aux États-Unis, à cause de la fécule qu’elle fournit et qui est très-connue sous le nom d’arrow-root. La partie souterraine de cette plante, qu’on cultive également dans les serres, va en se rétrécissant jusqu’à son point de rencontre et d’attache avec un gros tubercule allongé horizontal et riche en fécule. C’est pour ce tubercule que la plante est cultivée. De ce rhizome renflé partent des jets souterrains qui se renflent à leur extrémité, puis qui sortent de terre. La tige de ces végétaux s’élève environ de 1 mètre ; elle est herbacée, rameuse et à nœuds renflés. Les feuilles inférieures présentent une large et longue gaine. Elle se déploie en une lame grande, ovale et lancéolée, puis diminue en montant le long de la tige et finit par laisser la gaine toute seule. Les fleurs, blanches et délicates, sont géminées sur chaque rameau de l’inflorescence.

Les tubercules de la marante arundinacée ne sont pas les seuls qui fournissent de l’arrow-root, et une bonne partie de cette fécule qu’on livre à la consommation provient d’une autre espèce du même genre, la marante de l’Inde. Cette matière alimentaire est d’une digestion facile, et il paraît que les tubercules eux-mêmes qui la fournissent sont mangés, cuits sous la cendre, comme spécifique contre les fièvres intermittentes. On fait plus, on les écrase sur les blessures, particulièrement celles qui ont été faites par des flèches empoisonnées, d’où est venu le nom d’arrow-root, qui signifie racine à flèches.


MARAPHIEN s. m. (ma-ra-fi-ain). Hist. Membre de la deuxième des trois tribus nobles chez les Perses.


MARASCA s. f. (ma-ra-ska). V. marasque.


MARASME s. m. (ma-ra-sme — gr. marasmos ; de marainein, dessécher, flétrir, qui se rapporte évidemment à la racine sanscrite mar, mourir, latin mori). Méd. Consomption, perte totale des forces physiques : Tomber dans le marasme.

— Fig. Perte des forces morales, apathie profonde, dégoût de la vie. || Affaissement complet, perte de toute activité : Le marasme de la gloire ne se guérit jamais. (Th. Gaut.) La liberté absolue de l’imagination en produit le marasme. (Balz.)


MARASMODE s. m. (ma-ra-smo-de). Bot. Genre de sous-arbrisseaux du Cap, de la famille des composées.


MARASMOPYRE s. f. (ma-ra-smo-pi-re — du gr. marasmos, marasme ; pur, fièvre). Pathol. Fièvre hectique.


MARASQUE s. f. (ma-ra-ske — ital. marasca, même sens). Arboric. Espèce de cerise de Dalmatie, qui sert à faire le marasquin : La véritable marasque ne s’obtient que difficilement et chèrement par la voie de Venise. (Rauch.) || On dit aussi marasca, à l’italienne.


MARASQUIN s. m. {ma-ra-skain — rad. marasque). Boisson alcoolique, qui se fait avec la cerise appelée marasque : Elle supportait à merveille le vin de Constance et le marasquin de Hongrie. (G. Sand.)

— Encycl. Si la cerise qui donne le marasquin est produite par un arbre qui descend du pied importé par Lucullus, ce que nous ne sommes pas en mesure de vérifier, il est certain, du moins, que cette variété a pris des qualités et l’on pourrait dire des mœurs tout à fait spéciales. L’arbre qui produit la marasca (cerise à marasquin) croît, à l’état sauvage, dans les bois et les haies de la Dalmatie, d’où il s’est répandu en Italie, en Grèce et quelque peu en Provence.

La cerise marasca possède un arôme particulier qu’elle communique à la liqueur. Le goût de son noyau ressemble à celui des avelines. La fabrication du marasquin est des plus simples. Le fruit, cueilli bien mûr, est débarrassé de sa queue, puis écrasé, ainsi que son noyau. Cerises et noyaux sont jetés dans une cuve. On délaye ensuite, avec le jus du fruit, autant de livres de miel blanc que l’on a écrasé de 100 livres de cerises. Le tout ne tarde pas à subir une fermentation vineuse, après laquelle on peut distiller dans des appareils ordinaires. Dans le pays de production, peu de propriétaires possédant de ces appareils, le liquide obtenu par la fermentation est transporté à Zara, où les négociants l’achètent et le distillent eux-mêmes ; mais cette coutume tend à disparaître et les cultivateurs commencent à se procurer des apparais. Six mois ou un an après la distillation, a lieu la rectification au bain-marie, opération que l’on peut répéter plusieurs fois, jusqu’à ce que l’esprit soit dépouillé de tout corps hétérogène. Lorsque la saveur de la liqueur est arrivée au degré voulu de perfection, on la mélange avec du sirop simple et on n’a plus qu’à laisser vieillir le mélange pour obtenir une liqueur moelleuse et stomachique.

Le marasquin vieux se vend de 10 à 15 fr. le flacon à Zara, qui en expédie dans toutes les parties du monde. On trouve des marasquins à des prix bien moins élevés, mais ce sont des imitations parfaitement acceptables en soi, et qui n’ont que le tort d’usurper le titre de ma rasquins de Zara. Ce qui n’est justifiable à aucun point de vue, c’est l’audace qu’ont eue certains industriels de donner le nom de marasquin à d’affreuses boissons fabriquées avec du mauvais kirsch, des noyaux de cerises et même des feuilles de pêcher. De pareilles fraudes, atteintes par les lois qui frappent la tromperie sur la nature des marchandises vendues, ne peuvent d’ailleurs faire illusion qu’à ceux qui ne connaissent que de nom le véritable marasquin.


MARASSI, bourg et commune du royaume d’Italie, province et district de Gênes, mandement de San-Martino d’Albaro ; 3,781 hab.


MARAT, bourg et commune de France (Puy-de-Dôme), cant. d’Olliergues, arrond. et à 15 kilom. N.-O. d’Ambert, sur la rive droite de la Dore. Pop. aggl., 150 hab. ; pop. tot., 2,477 hab.


MARAT-LES-FORÊTS, nom donné à Saint-Saulge pendant la Révolution.


MARAT-SUR-OISE, nom donné à Compiègne pendant la Révolution.


MARAT (Jean-Paul), né à Boudry, canton de Neufchâtel (Suisse), le 24 mai 1743, mort assassiné, à Paris, le 13 juillet 1793. Sa mère était de Genève, son père de Cagliari en Sardaigne. Le véritable nom de la famille était Mara. Elle était, dit-on, d’origine espagnole.

Notre cadre ne nous permet pas d’étudier cette figure curieuse de Marat avec l’ampleur qu’elle mériterait. Nous y mettrons donc une certaine réserve, en réclamant l’indulgence du lecteur pour les erreurs dans lesquelles nous pourrions involontairement tomber, en faveur de notre intention sincère de rechercher l’exactitude et la vérité.

Parmi les puissantes physionomies de ce temps, si riche en personnalités fortes et originales, celle-ci nous effraye et nous écrase, nous l’avouons simplement et sans aucun embarras. Il est bien facile de dénigrer ou de maudire, de réhabiliter ou de glorifier sommairement, systématiquement ; les procédés sont connus ; il n’y a pas de besogne plus coulante et plus vulgaire.

Mais pour trouver la note juste, pour discerner le vrai au milieu de tant de jugements contradictoires, pour apprécier suivant les principes rigoureux d’une critique judicieuse, positive et véritablement impartiale, surtout en des sujets où nos passions politiques et nos énergies intellectuelles sont engagées, cela n’est plus aussi facile, on en conviendra, que de trancher les questions par un arrêt bref, absolu, avec la suffisance pédantesque des sectaires et des écoliers.

Le travail biographique le plus étendu, le plus consciencieux et le plus complet sur le célèbre révolutionnaire est celui de M. Alfred Bougeart (Marat, 1865, 2 vol. in-8o), dont les tribunaux de l’Empire avaient interdit la circulation en France, par servilisme ou par ineptie.

On peut ne point partager tous les enthousiasmes de l’auteur, mais on ne saurait trop admirer ses patientes recherches, ses études obstinées, ses laborieuses investigations. Pour de tels travaux, il faut la foi, la passion du disciple. Un écrivain plus froid ne les accomplirait pas, et la science historique y perdrait.

Marat reçut une forte éducation dans la maison paternelle. Il apprit la plupart des langues de l’Europe, l’histoire, la médecine, les sciences, etc. Marat le père, médecin et érudit estimé, songeait surtout à faire de son fils un savant, à le mettre en état, par ses connaissances, de se créer lui-même une position honorable, car il n’avait aucune fortune à lui laisser.

L’enfant, richement doué, cela est incontestable, étudia avec passion et prit à cette école des habitudes de travail qu’il a gardées toute sa vie. Il a pu dire de lui-même, avec beaucoup de vraisemblance : « Dès l’âge de dix ans, j’ai contracté l’habitude de la vie studieuse ; le travail de l’esprit est devenu pour moi un véritable besoin, même dans mes maladies ; et mes plus doux plaisirs, je les ai trouvés dans la méditation. »

Tout ce qu’on connaît de lui nous le montre en effet comme un travailleur infatigable. On sait qu’il mourut la plume à la main. Il ne l’avait, pour ainsi dire, jamais quittée.

À seize ans, il perdit sa mère, qu’il adorait, et partit aventureusement à travers le monde, comme un nouveau Jean-Jacques, séjourna deux ans à Bordeaux, dix à Londres, puis à Dublin, à La Haye, à Amsterdam, etc., vivant de leçons de langues e* de l’exercice de la médecine, car il ne devait avoir que peu ou peut-être point de patrimoine.

Nature nerveuse, ardente, d’une irritabilité un peu maladive, passionné de bonne heure pour la célébrité, il se précipita à corps perdu dans toutes les espèces d’études et de travaux : philosophie, médecine, physiologie, physique, etc., il semblait qu’il voulût tout embrasser et tout réformer. En 1773, il publia à Londres un traité philosophico-scientifique en trois volumes, intitulé De l’homme, où il réfute avec sa véhémence naturelle Helvétius, Descartes, Malebranche, et où il n’épargne pas même le dédain à Voltaire.

Ainsi, il entrait dans la publicité par la guerre, en réformateur militant, sans ménagements pour les renommées, de façon à se créer des légions d’ennemis dès ses premiers pas, parmi les nombreux disciples de ceux qu’il attaque.

Tel il fut constamment, soit dans les sciences, soit dans la politique. C’était un effet de son tempérament, de son orgueil, si l’on veut, de son caractère entier, non moins que de sa passion de réforme, et de son exaltation très-sincère. Ces dispositions, en l’entraînant dans de nombreuses polémiques, eurent une fâcheuse influence sur le reste de sa vie. Désormais il ne quittera plus la brèche, il sera toujours tourmenté par l’excitation du combat.

Voltaire, extrêmement sensible à toute critique, ne dédaigna point de répondre à cet inconnu par quelques railleries spirituelles.

Marat publia ensuite, à Londres (1774), un livre hardi qu’il avait écrit en anglais, les Chaînes de l’esclavage, qui est loin d’être sans valeur. M. Michelet lui-même a dit de cet ouvrage politique, qu’il appelle avec peu d’exactitude un pamphlet : « Il est plein de faits, de recherches variées ; le plan n’en est pas mauvais ; malheureusement l’exécution est très-faible, le style fade et déclamatoire. »

On trouvera d’ailleurs l’analyse détaillée de tous les écrits de Marat dans le livre de M, Bougeart, ainsi que dans la bibliographie complète de ses œuvres (travail autrement sérieux que ceux de Brunet et de Quérard), par un bibliographe éminent, M. Chevremont. Ce qu’on doit faire remarquer, c’est que, longtemps avant la Révolution, Marat, compatriote et disciple de Rousseau, avait écrit contre toutes les espèces de tyrannies et plaidé avec chaleur la cause de la justice et de la liberté.

Comme savant, nous ne savons s’il a jamais été jugé équitablement et sans prévention.

Ce qu’il y a d’indubitable, c’est qu’il était un savant sérieux, infatigable dans ses recherches, un expérimentateur des plus laborieux. M. Michelet paraît l’avoir jugé, sous ce rapport, assez légèrement. Il a consulté quelques savants, qui lui ont donné un jugement tout fait, sommaire et magistralement dédaigneux. Mais peut-être cet arrêt n’est-il pas sans appel.

Marat a écrit sur le feu, la lumière, l’électricité, l’optique, etc. Son grand tort, c’est d’avoir apporté son humeur batailleuse dans les sciences, de l’avoir pris vraiment d’un peu trop haut avec Newton, et d’avoir même traité de charlatans des savants illustres comme d’Alembert, Meunier, Lalande, Laplace, Lavoisier, etc. Il était présomptueux, réformateur à outrance, on ne saurait le nier, et très-probablement il s’exagérait l’importance de ses découvertes ; mais ces défauts, assez communs chez beaucoup de savants novateurs, ne devraient point faire méconnaître ses mérites réels, qui semblent incontestables.

Un savant de notre époque, le docteur Merny, a repris ses idées sur les causes de la chaleur solaire, en le citant avec éloges dans des ouvrages de haute science (signalés par Ch. Brunet, qui cependant ne parle de Marat qu’avec horreur).

En 1779, l’Académie des sciences, après examen de son mémoire sur le feu, l’électricité, etc., constata (séance du 17 avril) que ses expériences étaient nouvelles, exactes, bien faites, et faites d’après un moyen nouveau, ingénieux, le microscope solaire, propre à ouvrir un vaste champ aux recherches des physiciens, etc. On ne parle pas ainsi d’un visionnaire et d’un ignorant.

Ajoutons que l’illustre Franklin assistait aux expériences et les jugeait fort sérieuses, et qu’il entretint une correspondance avec l’auteur.

D’un autre côté, plusieurs des ouvrages de Marat furent traduits en allemand, ce qui montre bien qu’ils étaient remarqués et qu’on tenait leur auteur pour un physicien sérieux, ce qui pourrait être corroboré par beaucoup de témoignages et de faits.

Enfin nous citerons encore une lettre de Formey, secrétaire perpétuel de l’Académie de Berlin, adressée à Marat (Berlin, 19 février 1779), et dans laquelle il lui mande que le mémoire qu’il a envoyé à l’Académie a été examiné par des commissaires, et il ajoute : « Ils ont fait hier leur rapport, suivant lequel vos recherches sont très-estimables, et il y a lieu de croire qu’en les continuant vous procurerez des accroissements aux sciences. » Il s’agissait de recherches sur la nature du feu.

Malheureusement, Marat, par ses polémiques hautaines, ses prétentions et ses dédains, trouva le moyen de s’aliéner à jamais les académies et les savants. On organisa contre lui la conspiration du silence ; ce fut comme un mot d’ordre et un parti pris ; on lui rendit guerre pour guerre. Ce fut un véritable étouffement.

Mais, répétons-le, c’est un procès à revoir.

De nos jours, nous avons vu pareille chose avec Raspail, qu’on ne juge pas cependant sans mérite, mais qui, sous le rapport scientifique, est très-probablement au-dessous, de Marat.

Nous ne nous attarderons pas à réfuter tant de fables grossières qui traînent dans les pamphlets royalistes, et qui représentent Marat, non comme un médecin, mais comme un charlatan débitant ses drogues sur les places publiques de Paris. Est-il nécessaire d’ajouter que cette historiette, qui a contre elle toutes les vraisemblances, ne s’appuie pas même sur l’ombre d’une prouve ?

Ce qu’il y a de certain, c’est qu’il obtint en 1779 la charge de médecin du personnel des écuries du comte d’Artois, et qu’il devint ensuite médecin de ses gardes du corps. Pour être admis en cette qualité dans la maison d’un prince du sang, il fallait bien, on le reconnaîtra, qu’il eut une notoriété sérieuse comme praticien ; car il ne devait pas manquer d’aspirants, même parmi les membres de l’Académie de médecine. Il exerça cette charge jusqu’en 1787.

Que ce philosophe, cet ennemi des grands fût attaché à la maison d’un prince, c’est ce qui peut choquer quelques rigoristes ; mais il faut rappeler que cela ne tirait pas à conséquence dans l’ancien régime ; la plupart des hommes qui marquèrent dans la Révolution avaient passé par des situations analogues.

Au reste, la position de Marat enchaînait si peu son indépendance d’écrivain, qu’en 1778, une société helvétique ayant mis au concours un plan de code pénal, il se plaça sur les rangs et publia en 1780, à Neufchâtel, son Plan de législation criminelle, qui fut réimprimé plusieurs fois depuis.

Une chose assez piquante, c’est que l’empereur Joseph II adopta quelques-unes des idées proposées dans ce traité, notamment les dispositions propres à empêcher que la honte du supplice d’un individu ne retombe sur sa famille.

À une époque où la législation criminelle était encore, comme le dit d’Alembert, un chef-d’œuvre d’atrocité et de bêtise, cet ouvrage rangeait son auteur dans l’école de Beccaria et des criminalistes philanthropes. Il n’est point sans mérite et contient, au milieu de quelques divagations, beaucoup d’idées raisonnables et de vues excellentes, et généralement il est écrit d’un style ferme et précis.

On y rencontre, il est vrai, des idées un peu aventureuses sur le droit de propriété, et qui se rapprochent de celles que nous avons indiquées dans l’article consacré à Brissot, mais qui témoignent d’une noble sollicitude pour le sort des classes pauvres et de cette hardiesse d’idées qui distinguait les hommes du XVIIIe siècle.

L’auteur trouve ce droit fort incertain, en ce qui regarde la possession du sol, et le fait de la conquête primitive, la théorie du premier occupant, ne lui inspire pas un grand respect. S’il ne demande pas expressément le partage des terres, c’est qu’il le trouve impraticable. Mais il reconnaît au pauvre le droit absolu de vivre, et il formule cette proposition, reprise plus tard par diverses écoles socialistes : « Rien de superflu ne saurait appartenir légitimement, tandis que d’autres manquent du nécessaire. »

Dès le commencement de 1789 (en février, probablement), Marat écrivit son Offrande à la patrie, puis, un peu plus tard, un projet de Constitution qui renferme de larges vues de réformes, mais où il se montre partisan de la monarchie constitutionnelle. C’est d’ailleurs un fait bien connu que ceux qui, à cette époque, croyaient la République possible étaient infiniment rares.

Il publia en outre d’autres brochures, et réimprima son Tableau des vices de la constitution anglaise, publication pleine d’à-propos et destinée à mettre les députés en garde contre l’anglomanie, qui semblait prédominer dans le comité de constitution.

Nous ne parlerons point d’un Moniteur patriote, dont il paraît n’avoir fait qu’un numéro (des faiseurs reprirent ce journal), et nous arriverons tout de suite à son Ami du peuple, l’une des feuilles les plus fameuses dans l’histoire du journalisme, et dont il fit paraître le premier numéro le 12 septembre 1789, d’abord sous ce titre : le Publiciste parisien, journal politique libre et impartial, etc., avec la devise de Rousseau pour épigraphe : Vitam impendere vero. L’auteur, à ce qu’il assura plus tard, vendit les draps de son lit pour fournir aux premiers frais de sa publication. À partir du sixième numéro, il modifia ainsi son titre : l’Ami du peuple ou le Publiciste parisien..

La feuille, composée ordinairement de huit pages in-8o, parut sous ce titre jusqu’au 21 septembre 1792 (685 numéros).

À l’avènement de la Convention, Marat, nommé député de Paris, suspendit son journal pendant quelques jours et le fit reparaître le 25 sous ce titre ; Journal de la République française, par Marat, l’ami du peuple (143 numéros, 25 sept. 1792—11 mars 1793). La Convention ayant déclaré incompatibles les fonctions de député avec la profession de journaliste, il fit disparaître du titre de sa feuille le mot journal et la continua jusqu’à sa mort (13 juil-