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une rupture momentanée dans les relations de VAngletere et de la France. Ce dernier pays se rapprocha du cabinet de Vienne ; mais co rapprochement ne fut que momentané ; l’année suivante, un dissentiment s’éleva mfime à propos des affaires de la Suisso. L’avènement de Pie IX, qui passait à tort

fiour favoriser les idées libérales et nationaes, fut en Italie le signal d’une effervescence qui gagna bientôt la Lombardie, la "Vénétie, la Hongrie, la Bohême. M. de Meiternich essayait vainement de la comprimer, lorsque la chute de Louis-Philippe et la proclamation de la république vinrent ajouter de nouvelles complications à ces embarras. lie diplomate autrichien songea alors à faire des réformes dans le sens libéral, mais il était trop tard ; il fut débordé et l’insurrection de la Vénétie, le 13 mars 1848, l’obligea à donner sa démission d’un poste qu’il occupait depuis trente-huit ans. M. de Metternich traversa l’Allemagne en ébullition et alla à Dresde, d’où il fut obligé de gagner la Hollande, puis Bruxelles, où il s’établit en 1849. Au mois de juin de l’année 1851, il revint habiter sa propriété de Johannisberg, où le nouvel empereur le visita et vint lui demander ses avis, sans toutefois le rappeler aux affaires, ce dont il eut quelque dépit, d’autant plus qu’il se voyait remplacé par un homme bien inférieur à lui, le prince de Schwartzemberg, dont il était loin, et avec raison, d’approuver^ la politique.

Metternich vit la guerre de 1859, entre la France et l’Autriche, mais il mourut quelques jours trop tôt pour recevoir la nouvelle de la signature du traité de Villafranca, qui devait porter une si grave atteinte à l’œuvre de 1815. Le prince de Metternich avait été maria trois fois. Après avoir perdu sa première feïinne, il épousa, en 1827, la baronne Marie-Antoinette de Leykhnm, qu’il perdit le 12 janvier 1829. Il se remaria une troisième fois, le 30 janvier 1831, avec la comtesse Mêlante Zichy, morte cinq ans avant lui, le 30 mars 1854. De sa première femme, il a eu sept enfants, dont trois sont encore vivants ; ce sont trois filles, dont l’aînée a épousé le comte Sandor ; de sa seconde femme, il a eu un fils, Richard de Metternich, né le 7 janvier 1829, et qui a été ambassadeur d’Autriche à Paris ; enfin, la troisième lui a donné une tillé, qui a épousé le comte de Zichy, et deux fils, Paul de Metternich, né en 1834, et Lolhaire de Metternich, né en 1837. Le prince de Metternich aimait les sciences, les lettres, les arts, qu’il cultivait pendant ses loisirs. a Homme d’esprit et non de génie, dit M. Léo Joubert, plus capable de proiiter des circonstances que de les faire naître, plus habile à tourner les difficultés qu’à les résoudre, devant beaucoup à sa haute naissance, il eut le mérite et le bonheur de conduire supérieurement les affaires de son pays à travers la crise de 1813, et depuis il vécut un peu sur sa réputation. À force d’entendre dire qu’il représentait le génie de la résistance, il avait fini par le croire, et il aimait à se donner pour un professeur infaillible de politique conservatrice. » — « Son système à l’intérieur, dit Capeligue, consistait à maintenir, à l’aide d’une police ombrageuse, de la censure et d’un blocus intellectuel, l’Autriche en dehors de l’influence et de l’action des idées révolutionnaires, à conserver immobile le statu qua en défiance des innovations, quelles qu’elles fussent. Toutefois, cette tactique fut impuissante à protéger la monarchie autrichienne contre l’agitation révolutionnaire de l’époque. Sous ce système engourdissant, l’administration avait fini par

perdre toute énergie. » Le prince do Metternich employa tout son talent, et un talent très-réel, à soutenir cette politique à courte vue, politique fausse, impuissante, qui consiste à refouler toutes les aspirations légitimes des peuples, à n’accorder aucune réforme jusqu’à l’heure où éclatent les révolutions. On ne saurait donc considérer M. de Metternich comme un grand homme d’État ; mais, tout en soutenant une politique immorale, il se montra, incontestablement, un diplomaterecors, rompu aux affaires, et il exerça sur la diplomatie européenne un incontestable ascendant. Si on le considère à

co dernier point de vue, on ne saurait nier qu’il n’ait employé tous ses efforts à rendre 1 Autriche puissante et forte ; mais, comme il ne s’appuyait que sur la force, son œuvre devait être éphémère, et elle commençait à tomber eu dissolution lorsqu’il mourut. « Il lit de l’Autriche, dit un écrivain anglais, l’une des plus grandes monarchies de l’Europe, fortifiée sur le Pô, sur le Danube, sur le Rhin, touchant d’un côté aux riches plaines de l’Italie, appuyée sur la haute Allemagne, l’illyrie, les provinces slavoniennes, et s’etendant jusqu’aux rives des Riesengebirge. Comme ministre de cet immense empire, Meiternich fut le Titan de son siècle. Sans recourir au glaive, partout où il étendit son action, il remporta la victoire. Par de secrètes stipulations avec les princes, l’Italie était à ses pieds. Il gouvernait la Germanie au moyen de la confédération qu’il avait lui-même organisée et qui, outre les troupes impériales, plaçait sous son contrôle une armée de 300,000 hommes. Napoléon lui-même, dans la suprématie de son pouvoir, avait à peine une armée plus considérable que celle que Metternich acquit par des moyens pacifiques et conserva en persuadant à l’Europe qu’elle était nécessaire an

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maintien de la paix générale... Dès l’âge de vingt-cinq ans, jusque vers la fin de sa vie, il fut le véritable régent de cet amas de populations hétérogènes réunies sous le sceptre de la maison de Habsbourg ; et le prestige de sa haute situation, joint au succès de sa tactique, lui donna près des princes étrangers plus de crédit qu’ils n’en accordaient souvent à leurs propres conseillers. Son nom était également respecté à Rome, k Pétersbourg, à Paris pendant la Restauration, à Londres pendant la régence, et à Vienne. Son action n’était donc point, comme celle des autres potentats, restreinte dans les limites de son pays, elle s’étendait aux plus importants du globe. Partout où il s’élevait quelque grande question, sa voix avait la prépondérance. Pendant plus d’un demi-siècle, il présida aux conseils de la diplomatie et fut le guide de la politique européenne. »

METTERNICH-W1NNEBURG (Richard-Clément-Joseph-Lothaire-Hermann, prince de), diplomate autrichien, fils du précédent, né à Vienne en 1829. Son père apporta le plus grand soin’ à diriger son éducation et s’attacha à l’initier de bonne heure à la connaissance des hommes et des affaires politiques de l’Europe. Lorsque la révolution de 1848 força le vieux diplomate à abandonner le pouvoir et à quitter momentanément l’Autriche, son fils l’accompagna en Angleterre, puis en Belgique, lui servit de secrétaire intime et débuta dans la carrière diplomatique, le 2 décembre 1852, comme attaché à la légation d’Autriche à Paris. En 1854, le prince Richard de Metternich devint secrétaire de la légation. Deux ans plus tard, il épousa la princesse Pauline Sandor (née en 1836). qui devint une des femmes les plus en vue du monde élégant et de la cour des Tuileries. Lorsque, en 1859, le gouvernement français déclara la guerre à l’Autriche pour soutenir l’Italie, te prince de Metternich quitta Paris avec l’ambassade pour retourner en Autriche ; mais après la paix de Villafranca à fut désigné par le cabinet de Vienne (H décembre 1859) pour aller, en qualité d’ambassadeur extraordinaire, renouer des relations diplomatiques à Paris. Fort bien en cour, le prince de Metternich se vit toujours accueilli avec une faveur marquée par l’auteur du coup d’État du 2 décembre, qui voulait s’assurer de l’alliance de l’Autriche en cas de guerre avec la Prusse. En 1862. le prince Richard reçut le titre de conseiller héréditaire de l’empire d’Autriche et, deux ans plus tard, celui de conseiller intime. Lorsque, en 1870, la candidature du prince de Hohenzol-Jern au trône d’Espagne provoqua entre le cabinet de Berlin et celui des Tuileries un conflit diplomatique qui devait avoir do si terribles conséquences pour notre pays, le gouvernement Irancais s’efforça d’entraîner 1 Autriche à se joindre à lui pour combattre la Prusse et fit des ouvertures en ce sens à M. de Metternich, qui dut se borner à des témoignages de sympathie. Malgré le langage

de M. de Beiist, recommandant une solution pacifique, le cabinet des Tuileries, avec sa légèreté coupable et sa pitoyable incapacité, prit ses désirs pour des réalités, et ce ne fut pas sans surprise, après la déclaration de guerre, lorsqu’il avait laissé entrevoir au Corps législatif, par l’organe de M. de Gramont, l’existence d’une alliance effective avec l’Autriche, qu’on vit cette puissance proclamer sa neutralité. Le 4 septembre, lorsque l’empire croula, l’impératrice Eugénie dut s’enfuir des Tuileries et aila chercher un asile auprès de M. de Metternich, à l’ambassade d’Autriche, Elle le quittait peu après pour monter dans un train du chemin de fer du Nord, qui la conduisit hors de France. Lors de l’investissement de Paris par les Prussiens, M. de Metternich fit partie des diplomates étrangers qui restèrent dans cette ville, et il conserva son poste d’ambassadeur à Paris jusqu’au 19 décembre 1871, époque où il fut remplacé par le comte Apponyi, 11 retourna alors en Autriche et parut renoncer à la diplomatie.

METTERNICHIE s. f. (mé-tèr-ni-kî — de •Mellernicfi, nom propre), bot. Genre de plantes, dont la place n’a pas encore été bien fixée, et qui comprend des arbres du Brésil, à feuilles alternes, entières, brillantes, à fleurs terminales blanches ou roses.

METTETAL (Pierre-Frédéric), homme politique français, né à Glay (Doubs) en 1814. Parent par alliance de M. Guizot, et, comme lui, membre de la religion réformée, il vint chercher fortune à Paris sous le règne de Louis-Philippe, et obtint un emploi à la préfecture de police, où il devint chef de division. En 1850, M. Mettetal devint membre du consistoire de l’Église réformée de Paris et fit partie, avec M. Guizot, des protestants autoritaires qui firent, surtout vers la fin de l’Empire, une guerre acharnée aux protestants libéraux et au pasteur Martin Paschoud. Zélé fonctionnaire du gouvernement impérial qui, selon ses expressions, « le traita toujours avec considération et justice, • M. Mettetal prit, après la révolution du 4 septembre 1870, la garde de la préfecture de police, puis la remit à M. de Kératry, nommé préfet, et fut maintenu par lui dans son poste de chef de division ; mais, après la nomination do M. Antonin Proust comme secrétaire général, il donna sa démission et vécut dans la retraite. Lors des élections du 8 février 1871,

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il se porta candidat à l’Assemblée dans le Doubs, en se recommandant de lettres de MM. Thiers et Guizot. Elu député comme conservateur libéral, il alla siéger dans le groupe du centre droit et n’a cessé, depuis lors, de voter avec les adversaires déclarés du gouvernement républicain. Il s’est prononcé notamment pour les préliminaires de paix, l’abrogation des lois d exi !, la proposition Rivet, le pouvoir temporel du pape, contre la dissolution, pour la loi contre la municipalité lyonnaise, et a contribué, le 24 mai 1873, au renversement de son ancien patron, M. Thiers. Après la constitution du gouvernement présidé par le maréchal Mac-Mahon, M. Mettetal fut proposé, par les journaux bonapartistes, pour occuper le poste de préfet de police : mais il ne fut point nommé et déclara dans une lettre qu’il repoussait la doctrine de l’appel au peuple. Depuis lors, il a fait partie du groupe de l’Assemblée qui s’est prononcé pour la restauration du comte de Chambord, et après l’avortement de cette tentative de restauration monarchique, si profondément antipathique au pays, pour la prolongation des pouvoirs du maréchal Mac-Mahon pendant dix ans. — Un membre de la même famille, Auguste Mettetal, né à Glay (Doubs) en 1825, s est fixé à Paris où il remplit les fonctions de pasteur protestant. On lui doit quelques écrits : Une Question actuelle (1861, in-8°) ; Une discussion du consistoire supérieur sur les droits des fidèles et les prérogatives des consistoires (1863, in-S°) ; Y Évangile de Luther et celui des Apôtres (1SG4, in-18) ; Y Église de la confession à Augsbourg de Paris (1865, in-8<>), etc.

METTEUR, EUSE s. (mè-teur, eu-ze — rad. mettre). Techn. Ouvrier, ouvrière qui met, qui est chargé de mettre. Il Metteuse en mains, Ouvrière qui forme des paquets en mains de soie : La metteuse en mains met au rebut la soie qui lui parait mauvaise et qu’on appelle défilé, chapelel.chapplé. (Kauffmann.) Il Metteur en œuvre, Ouvrier qui monte les perles, les pierres fines ou les imitations, et fig., Celui qui se sert des travaux d’autrui pour en faire quelque chose de nouveau : Le metteur en œovre travaille adroitement ce nue l’homme de goût a dessiné habilement. (Volt.) Pline était un metteur en œuvre. (Ste-Beuve). u Metteur en bronze, Ouvrier qui donne la couleur du bronze à certains ouvrages d’un autre métal,

— Typogr. Metteur en pages, Typographe chargé d’assembler les paquets de composition pour en former des pages.

— Théâtre. Metteur en scène, Celui qui sait arranger une action d’une façon dramatique.

— Sculpt. Metteur au point, Ouvrier qui dégrossit les ouvrages de sculpture.

METTRAY, bourg et commune de France (Indre-et-Loire), canton N, arrond. et à 8 kilom. de Tours, sur la Choisille ; pop. aggl., l,005hab. — pop. tôt., 2,344 hab. Sur le territoire de cette commune se trouve la colonie agricole et pénitentiaire de Mettray, fondée en 1840 par M. Demetz, peuplée de jeunes détenus acquittés comme ayant agi sans discernement. Avant la création des colonies pénitentiaires, les enfants acquittés comme ayant agi sans discernement étaient cependant envoyés en prison, et, bien que placés dans un quartier spécial et séparés des autres détenus, ils n’en étaient pas moins soumis à un régime qui avait la plus haute influence sur leur développement moral et sur leur constitution physique. Beaucoup de ces malheureux enfants arrivaient à la majorité n’ayant d’autre moyen d’existence que l’éducation industrielle, notoirement insuffisante, des ateliers de la prison ; un grand nombre d’entre eux, étiolés par le manque d’air.et de lumière, devenaient impropres au service militaire, et l’impôt du sang pesait plus lourd sur les autres jeunes gens du même âge.

Grâce à la généreuse et féconde initiative d’un homme de bien, M. Demetz, ancien conseiller à la cour d’appel de Paris, mort en novembre 1873, une société se fonda, en 1838, ayant pour but : « 1° d’exercer une tutelle bienveillante sur les enfants acquittés comme ayant agi sans discernement, qui lui seraient confiés par l’administration en exécution de l’instruction ministérielle du 3 décembre 1832 ; de procurer à ces enfants, mis en état de liberté provisoire et recueillis dans une colonie agricole, l’éducation morale et religieuse, ainsi que l’instruction primaire élémentaire ; de leur faire apprendre un métier, de les accoutumer aux travaux de l’agriculture et de les placer ensuite à la campagne, chez des artisans ou des agriculteurs ; de surveiller la conduite de ces enfants et de les aider de son patronage pendant tout le temps dont ils en ont besoin. » Tel est l’article 1" des statuts de la Société paternelle, dont le premier président fut le comte de Gasparin. M. Demetz fut aidé dans l’exécution de ses projets philanthropiques par un de ses anciens condisciples, le vicomte de Brétignières de Courteilles, qui mit à sa disposition une propriété située à Mettray, près lie Tours, et placée dans les conditions les plus favorables a la réussite de son dessein ; les bâtiments de la colonie s’élevèrent avec rapidité (1840).

Le but de l’institution étant de donner, autant que possible, aux jeunes détenus l’esprit do famille, les fondateurs firent construire

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pour les colons des maisons de famille. L’aspect général de la colonie n’a rien de la sévérité qui caractérise la plupart des établissements pénitentiaires. Des deux côtés d’une cour spacieuse sont rangées dix maisons d’une régularité d’architecture qui n’exclut pas l’élégance ; c’est dans ces maisons qu’habitent les enfants. Une église rustique, simple et majestueuse tout à la fois, s’élève au fond de la cour. À droite et à gauche de l’église se trouvent deux maisons plus vastes que les maisons d’habitation ; elles contiennent une grande classe, un magasin d’instruments aratoires et de modèles, des logements d’employés. Derrière l’église, un corps de bâtiment entouré d’une cour murée faisant préau renferme le quartier de punition ; la prison, où est appliqué le système cellulaire, forme le prolongement de l’église, de sorte quo les enfants détenus peuvent assister à la messe sans sortir de leurs cellules et sans s’apercevoir entre eux. Autour du quartier do punition se trouvent les cours et les bâtiments de la ferme. Dans un bâtiment placé à l’écart sont établis le3 services généraux, la lingerie, la boulangerie, la buanderie, la cuisine ; c’est aussi dans ce bâtiment que se trouvent l’infirmerie, la communauté, l’école des contre-maîtres, etc. Chacune des maisons d’habitation présente 12 mètres de longueur sur 6ii, gs, et se compose d’un rez-de-chaussée et de deux étages. L’espace de 10 mètres qui sépare chacune de ces maisons est occupé par des hangars qui servent de préau les jours de pluie. Les noms des bientaiteurs de la colonie ou des villes qui leur ont fait des dons collectifs sont inscrits sur la façade des maisons d’habitation. À l’exception de deux, dont l’une est occupée par l’aumônier et l’autre contient le cabinet du directeur et les bureaux d’administration, toutes ces maisons sont distribuées de la même manière. La pièce du

rez-de-chaussée sert d’atelier ; elle est, dans quelques maisons, divisée en quatre ateliers par une cloison tfssez basse pour qu’un surveillant, placé au centre, inspecte facilement chacune des divisions, assez haute pour que les enfants ne puissent pas se distraire mutuellement de leur travail. Au premier et au second étage se trouve une salle qui, par un système ingénieux, sert tour à tour de dortoir et de réfectoire, de salle de récréation pendant la pluie, et même, au besoin, de classe pour vingt enfants. Deux traverses, fixées par une charnière à une de leurs extrémités, sont dressées contre le mur, des deux côtés de la porte d’entrée. Veut-on préparer le réfectoire, les traverses sont abaissées sur des poteaux et partagent la pièce en deux divisions, en laissant un passage au milieu pour les surveillants ; des planches rangées contre les murs latéraux sont fixées sur les traverses, et le réfectoire est prôt. Veut-on préparer le dortoir, au lieu de planches, ce sont des hamacs plies contre le mur qu’on étend et qu’on accroche aux traverses. Au-dessus de chacun des hamacs est une case contenant les effets du colon. Au fond de la pièce est une petite alcôve fermée par des lames de persienne qui permettent de voir sans être vu. C’est là que couche le chef de famille ; il a sous sa surveillance deux sections de vingt enfants et est secondé par un contre-maître et par deux frères aînés nommés dans chaque famille, et pour un mois, par leurs camarades. Quatre familles de colons habitent dans quatre fermes détachées de la colonie.

Un grand nombre de colons viennent de départements très-éloignés^ et souvent ce sont les directeurs eux-mêmes qui vont les chercher dans les prisons. Dès son arrivée à Mettray, le détenu est placé dans une famille et on remploie à l’agriculture ou dans un atelier, en tenant compte de son âge, de sa force, et, autant que possible, de ses aptitudes. La règle à laquelle les détenus sont assujettis n’a rien de sévère. Le lever a lieu à cinq heures en été, à six heures en hiver ; habillement, ablution, prières et travaux jusqu’à huit heures ; une demi-heure pour le déjeuner et la récréation ; quatre heures de travail ; une heure pour le dîner et la récréation ; en été, classe de deux heures pendant la trop grande chaleur, puis travail de quatre heures : en hiver, au contraire, travail de quatre heures et classe de deux heures à la lumière ; une heure pour le souper, le chant du soir, la prière ; à neuf heures, le coucher. Les enfants reçoivent 750 grammes de pain par jour ; du lard et du bœuf à un repas, deux fois par semaine ; le reste du temps, delà soupe, des légumes, des fruits, du fromage, etc. Le clairon sonne le passage d’un exercice à un autre ; c’est aussi au son du clairon que chaque section, sous la surveillance de son contre-maître et de son frère aîné, se rend à l’atelier ou aux champs.

L’exploitation agricole de Mettray est très-étendue ; elle comprend 205 hectares, dont 12 en vignes ; les jeunes détenus tiennent dans un état parfait de conservation les chemins ruraux qui desservent les différentes parties du domaine. Les meilleures méthodes d’agriculture y sont mises en usage-, aussi cette exploitation est-elle des plus florissantes. La culture des mûriers et la magnanerie ont été naturalisées à Mettray ; un certain nombre d’enfant* sont employés à l’horticulture. On excite l’émulation parmi les colons en mettant les travaux à la tâche ; de temps en temps des concours ont lieu dans les ateliers outre