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MOIT

Fille qui n’est pas faite a ça

Est toujuurs, quand elle en vient là,

Moitié forcée et moitié consentante ;

Moitié voulant combattre ses désirs.

Moitié n’osant ; moitié peine et plaisir :

Moitié bien aise et moitié repentir.

La Fontaine.

Moitié guerre, moitié marchandise, D’une manière équivoque : Faire sa fortune moitié

QUKRRE, MOITIÉ MARCHANDISE. Il Moitié (le gré,

moitié Je force : On t’a fait consentir à cet arrangement moitié guerre, moitié marchandise.

Moitié figue, moitié raisin, Partie k contre-cœur, partie de bonne volonté ; partie bien, partie mal ; partie sérieusement, partie en plaisanterie : Moitié figue, moitié raisin, il s exécuta.

Être moitié chair, moitié poisson, Ne pus faire connaître ce qu’on veut ou ce qu’on l’ait, avoir une oouJuite équivoque.

r— Loc. adv. A moitié, A demi, en partie, pas complètement : Unis k moitié pourri. Tonneau À moitié vide. Bouteille A moitié pleine. Argent À moitié déprusé. On est À moitié guéri quand un veut sincèrement sa yuérisoit. (Sénèque.) Ceux qui font des révolutions A moitié ne font que se cre.user un tombeau. (Chateaub.) Lu grandeur des grands hommes, est fuite plus d’k moitié de la petitesse des autres. (A. Karr.) Souffrir, c’est ne viorequ’k moitié. (K. Al.etz.) titre tenté, c’est être k moitié vaincu. (Renan.) Ville qui parlemente est d moitié rendue.

Moein.

Heureux ou malheureux.

L’homme a besoin ti’autrui ;

Il ne vil qu’à moitié.

S’il ne vit que pour lui.

Demllb. il En réservant pour soi la moitié des fruits ou des bénéfices : Donner, prendre des terres À moitié. Labourer une terre k moitié.

A moitié chemin, Au milieu de l’espace à parcourir : llester k moitié chemin.

— A moitié prix, Pour lu moitié du prix ordinaire : Vendre une chose k moitié prix.

De moitié. Deux fois uuuiut qu’il fallait : Discours trop long de moitié, il Deux fois autant qu’à l’ordinaire :

Alors qu’une belle est en larmes. Elle est plus belle de moitié.

La Fohtaimb. ... Un philosophe, étayé D’un peu de richesse et d’aisance, Dans le chemin de sapience Marche plus ferme de moitié.

J.-B. Rousseau.

Être de moitié, Se mettre de moitié, l’aire une société à deux dans laquelle on convient de partager, pur égalfe pu ri, lu perte et le gain : Être de moitié dans une affaire. Ftke osi moitié avec quelqu’un dans son jeu. Se mettre de moitié avec quelqu’un. Il Participer, entrer en ligne de compte :

L’esprit n’est jamais las d’écrire, Lorsque le cœur est de moitié.

Gressst.

En rabattre de moitié, de la moitié, Revenir sur ce qu’on voulait, sur ce qu’un pensait, rabattre de ses prétentions, modérer son opinion.

Avoir payé plus de ta moitié de ses dettes, Avoir moins de temps à vivre qu’on n’a déjà vécu.

— Gramm. Moitié, tiers, quart, cinquième, etc., employés comme substantifs collectifs, déterminent eux-mêmes raccord des mots variables en rapport avec eus quand ils expriment la quantité précise obtenue en divisant par deux, trois, quatre, Cinq, etc. Mais quand ils marquent évidemment une exagération ou une simple approximation, quand la quantité qu’ils représentent n’a rien de précis, de Axe, on peut tout faire accorder avec le complément amené par la préposition de : La moitié des députés a voté pour ta loi, l’autre moitié A VOTÉ contre. La moitié démet fruits sont gâtés. Un bon tiers des Parisiennes i’ENNUiENT-au spectacle.

— Rem. Dans la conversation la mot moitié est très-souvent mal employé ; ainsi l’on dit : Cette corde n’est pas assez langue, j’en voudrais la moitié plus, pour dire : J’en voudrais le double ou deux fois autant.

Moitié du chemin (la), comédie en trois actes et en vers, par Picard, représentée au Théâtre-Français en 1793. Il est convenu que les jumeaux, qu’ils s’appellent Jacob et Esaù ou qu’ils portent le nom de Menechmes, sont faits pour se disputer le droit d’aînesse. Les Mènechmes de Picard s’appellent Desprës et habitent l’un Angers et 1 autre Paris. Celui-ci est père d’une fille charmante, et celui-là d’un dis également charmant, qui ne demanderaient quà se marier ; malheurousement, les compétitions des pères s’y opposent absolument. Comment faire ? Le Deus ex machina se présente sous la figure d’un aimable Gascon du nom de Figeac, qui imagine une ruse digne de Scapin. Il écrit k Desprès de Paris, pour lui annoncer la mort de Desprès d’Angers, et réciproquement. La perspective d’hériter n’éteint pas tout sentiment fraternel, dans ces deux cœurs excellents au fond, mul^rè le droit d’aînesse. On part en grand deuil et le cœur bien gros, chacun de son côté. On arrive juste en même

Morv

temps, à moitié chemin, dans la même auberge, au Mans. Figeac manœuvre si bien que les amants ont toute liberté de se voiret les pères n’arrivent jamais k se rencontrer. Bref, quand l’affaire lui paraît mûre, Figeac jette les deux jumeaux dans les bras l’un de l’autre, et parvient sans peine à leur persuader que le droit d’aînesse, vendu autrefois pour un plat de lentilles, aboli depuis par la Constituante, ne vaut pas que deux frères jumeaux se brouillent pour lui et empêchent le bonheur de deux jeunes gens si bien faits pour s’aimer. Qui résisterait à de pareils arguments ?

Lu pièce de Picard est intéressante, bien conduite, mais très-faiblement écrite. -Elle a été reprise plusieurs fois avec succès.

MOITIR v. a. ou tr. (moi-tir — rnd. moite). Humecter, rendre moite : L’humidité est si forte ici qu’elle moitit tous nos meubles.

— Techn. Imbiber d’eau : Moma les papiers. Moitir les chiffons.

MOITHEL D’ÉLÉMENT, physicien français ; né en 1678, mon eu 1730. Il habitait, vers 171 S, une misérable mansarde k Puris, lorsqu’il découvrit le moyen de recueillir les gaz et, par suite, de les étudier en eux-mêmes et dans leurs combinaisons. Pour faire connaître sa découverte, il ouvrit un cours de chimie pratique qui n’eut aucun succès, fut traité de fou par les membres de l’Académie des sciences et finit par suivre en Amérique, où il mourut, une personne qui l’avait pris en amitié. Uu a de lui une brochure rarissime, publiée en 1719, et dans laquelle il expose ses expériences et ses idées, que la science moderne devait confirmer.

MOITTE (Pierre-Étienne), graveur, né k Paris en 1722, mort dans la même ville en 1780.- Il suivit les leçons de Beauvarlet et de P.-F. Beaumont, se fit connaître comme un habile graveur a la pointe et nu burin, devint membre de l’Académie de peintura en 1771 et reçut, en 1780, le titre de graveur du roi. Moitié a laissé de nombreuses planches d’après Miéris, Teniers, Wouwerman, Boucher, Lancret, Greuze, etc. On cite, parmi les plus remarquantes, celles qu’il exécuta pour la Galerie de Dresde et pour la Galerie du comte de liruht, le portrait de tiestout, d’après Latour, "celui de Duhamel du Monceau. Il eut plusieurs enfants qui cultivèrent également les arts :— Angélique Pose, qui a gravé le paysage -, — Elisaheth-Mélanie, qui s’est surtout attachée à reproduire avec le burin des tableaux de Greuze ;—François-Auguste, également graveur, mort vers 1790, k qui l’on doit de bonnes et fines reproductions d’œuvres de Greuze, le Catéchisme et le confesdonat, d’après Baudoin, la liccréution de la table, d’après Jordaens, etc. ;— Jëan-Bapsiste-Philibert, mort en 1808 à Dijon, où il professait l’urchitecture ; — enfin, Jean-Guillaume, dont nous allons parler.

MOITTE (Jean-Guillaume), sculpteur français, fils du précédent, né à Paris en 1747, mort dans la même ville en lsio. De très-bonne heure, il montra de rares dispositions artistiques qu’il développa par un travail assidu, prit successivement des leçons de Pigaile et de Lemoyiie, remporta presque toutes les’médailles dans divers concours de l’Académie et obtint, en 1768, le grand prix de sculpture. Arrivé en Italie, Moitte joignit à l’étude du modèle vivant celle des plus belles statues et des plus beaux monuments de l’antiquité que possède Ruine et acquit alors, dit Périès, le goût exquis et la correction du dessin, l’élégance des formes, la beauté des proportions, l’heureux choix des draperies et la variété d’expression qu’il a su répandre dans ses ouvrages. De retour k Paris, il exécuta pour Auguste, orfèvre du roi, une foule de dessins k la plume extrêmement remarquables, qui servirent à ce dernier de modèles pour ses plus beaux ouvrages. Sa statue du Sacrificateur lui valut d’être nommé membre de l’Académie en 1783. Depuis lors, il exécuta un grand nombre d’ouvrages, parmi lesquels nous citerons : Vestale ■faisant l’aspersion de l’eau lustrale ; Ariane ; les statues colossales des provinces de Bretagne et de Normandie, placées à la barrière des Bonshommes ; des Bas-reliefs et Sphinx au château de l’Isle-Adam ; des Bas-reliefs pour plusieurs barrières de Paris ; une remarquable statue de Cassini, commandée par Louis XVI et qui ne fut terminée qu’après la Révolution ; le beau bas-relief du fronton du Panthéon représentant les Vertus civiques et les Vertus guerrières, lequel fut brisé lorsque ce monument fut rendu au culte : le modèle d’une statue de/.-/. Rousseau, laquelle devait être exécutée en bronze pour être mise aux Champs-Élysées (179*) ; la France entourée des Vertus, appelant ses enfants à sa défense, bas-relief pour le vestibule du Luxembourg ; la statue équestre en bronze de Bonaparte} celle du général D’Haulpoul, dont Moitte n exécuta que le modèle en petit ; le tombeau du général Leclerc ; des bas-reliefs en bronze pour la Colonne du camp de Boulogne, etc. Les ouvrages de Moitte se distinguent en général par l’élégance et la sévérité du style.

MOIVBB (Abraham de), célèbre géomètre français, né k Viiry (Champagne) en 1667, de parents protestants, mort k Londres le 27 novembre 1754. La révocation de l’édit de Nantes l’avait forcé de s’expatrier ; il se retira

MOIV

à Londres, où il n’eut, pendant longtemps, d’autre ressource que d’enseigner les mathématiques, qu’il avait apprises en France sous le célèbre Ozanam. Il entra bientôt en relation avec Newton et Halley, qui se chargèrent de communiquer ses premiers ouvrages k la Société royale de Londres, dont ils le firent recevoir membre en 1697. Il devint successivement membre des Académies de Berlin et de Paris. Il fut l’un des commissaires nommés par la Société royale pour juger le différend entre Leihuitz et Newton. Ce dernier avait pour lui la plus grande estime, et l’on rapporte que dans les dernières années de sa vie, lorsqu’on lui venait demander quelques explications sur ses ouvrages, il répondait le plus souvent : « Voyez M.’ de Moivre, il sait toutes ces choses-là mieux que moi.» Moivre mourut d’une façon assez.singulière. Depuis quelque temps, il dormajt chaque jour un peu plus que la veille et était, ainsi arrivé k dormir ving-trois heures par | jour ; le 87 novembre 1754, il dormit les vingt- ■ quatre heures et ne s’est pas réveil !-’ depuis, j Ses principaux ouvrages sont : De meusura. sortis, refondu plus tard dans The Doctrine of j chances, qui a eu trois éditions (1716, 1738 et 1756) ; Miscellanea annlylica de seriebus et quadraturîs (1730) ; Annitities on lives (1724, 17-12, 1750), dont Fotiiuna a donné une traduction en italien ; enfin, un grand nombre de mémoires insérés dans les Transactions philosophiques. L’astronome Grandjean de Fouchy a fait son éloge, inséré dans le recueil de l’Académie des sciences.

Outre sa célèbre formule et son théorème (v. ci-après), on doit à Moivre la théorie des séries, récurrentes qu’il rencontra dans ses recherches sur le calcul des probabilités, et qu’il acheva presque seul ; l’introduction, dans la science, de ce principe que lu probabilité d’un événement composé est le produit des probabilités des événements simples qui le composent ; la soluton de quelques dernières difficultés relatives à la décomposition des fractions rationnelles en fractions simples et à l’intégration des différentielles rationnelles, que la mort n’avait pas laissé k son ami Cotes le temps de lever ; enfin, il partage avec Lambert l’honneur d’avoir donné naissance k la trigonométrie imaginaire en transportant du cercle k l’hyperbole les théorèmes relatifs k la multiplication et k la division des secteurs.

On cite encore de Moivre deux théorèmes curieux d’astronomie, mais qui sont restés sans utilité ; les voici : 1° La vitesse d’une planète en un point quelconque de son ellipse est k sa vitesse au sommet du petit axe comme la racine carrée de sa distance au foyer supérieur est k la racine carrée de sa distance k l’autre foyer ; et 2° Le rayon vecteur est au sinus de l’angle qu’il fait avec la tangente comme la moyenne proportionnelle entre les distances aux deux foyers est au demi-petit axe.

Moiwr» (théorème de). Ce sont les recherches de Moivre sur la décomposition des fractions rationnelles en fractions simples qui l’ont conduit a son théorème, un peu plus général que celui de Cotes. Cotes avait donné la loi de décomposition, en facteurs réels du second degré, d’un trinôme 12m± txm + 1 ; Moivre étendit le théorème au cas du trinôme xZm' — zpxm+ l. Soit, dans un cercle de rayon 1, AM„ la m, éme partie de l’arc dont le cosinus est p, ce nombre p étant d’abord supposé compris entre —■ 1 et + 1 ; si l’on partage la circonférence en parties égales, M, Mu MiMj, etc., les facteurs de

«S"1 o—.»n i i x — 2px ■+•1

seront représentés, pour une valeur OX de x, par les carrés des distances du point X aux points de division M„ M„ etc.

MOIV

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„2m

les facteurs binômes de xim'— zpxm +1 seront donc de la forme

a + tkit.... a -}- ikx

x — cos : ±v — 1 sin T, L>

En effet, les valeurs de je"* tirées de l’équation

sont

ou

a-Sm 2pzm + 1 = 0

> p ± vV — 1 = p±v’l — p’ V~ !

soit a l’un des arcs qui ont p pour cosinus, on aura donc ■ = cos a ± V— 1 sin a,

et, par suite

■■ cos ■

a + 2k*

a + îftv.

. m m

or, pour que le produit de deux facteurs


x — cos < v — 1 sin et

« — cos •

m

a + Zk’*

m

— q ; y — i sm tn

a + 2k’* m ’

soit réel, il faudra que et que

. a + îAn sin ■

m a ■

. a + 2/c’ti

sin ■, =» 0,

m

tk’-z. a + ï/rn

cos sin -

ni m i


±cos r-sin ■ = 0.

m m

La second.6 formule donne., ,’ i

. fa + 2kr., a + 2fc’n

sin [ — ! ± — — 1 ■= 0,

m m }

et, par conséquent,

a + 2A-iî. a + 2/i’it

— !—^— ± —■ = 0, ou *, ou Bit, ou 3n ;

m., m.., ,

la première, de son côté, donne,

m

■ -)- sin

. / a + 2/c’r. '.

et, par conséquent,

a + 2Ait, a -f 2&’*

—■ ±—■ = 0 OU 2*

« i m,

ou

a + 2&is a + 2fc’s

. q2 —■ = it, ou 3it.

ni ’ m

II faut donc, pour que les deux conditions

soient remplies en même temps, que

a + 2k- !c, a + 2/c’n „ „, ...

— ±—• = 0 ou 2n,

mm

le signe ± provenant de l’incertitude qui pesait sur le facteur k combiner avec

.a -f 2/fn /. a 4- 2*i= i

x— cos V — 1 sin—^.

m »*

On voit par lk, a n’ayant aucun rapport nécessaire avec -n, que ce second facteur doit, être

a + 2k’«, ,— :.. o 4 Zk’*.

x — cos r V — 1 sin —, ,

td ■ ■ m.r

d’ailleurs, la condition k remplir par k et k’ se réduit alors k

le — k’ = o ou k — k’ = ni.

Supposons qu’on prenne k = k’, alors les deux facteurs qui donneront un produit réel seront

et

et ce produit sera

a" — 2js cos a + île-a, ., a + 2fr s’ — h sin’ ——,

a + ikv m

+ cos"

m

ou simplement

x1 — 2x cos f- ! »

m

or, le carré de la distance du point X au kiéme point de division MA est évidemment

XM^Xiy + P^M’fc, ’■

c’est-à-dire

XM ; = (. — cos ) + sm’-lr-,

ou

XMft* = X* — &TC03

a + 2*n

—M-

Le théorème étant ainsi démontré pour le cas où p est compris entre — 1 et + 1, oh’ retendrait aisément au cas où p serait quelconque, en substituant l’hyperbole équilutère au cercle j mais alors, d une part, l’arc a ayant pour cosinus p serait imaginaire sans partie réelle, par conséquent chaque facteur de la forme

a+Shs, ,

x* — S* cos 1-1

m

serait imaginaire ; de l’autre, les point»

M„ M„ M„...

devraient être marqués sur les hyperboles conjuguées du cercle, tangentes k ce cercle k rorigine des arcs et k tous les points de division de la circonférence en m parties égales, de manière que l’arc de chaque hyperbole compris entre son sommet et le point M marqué sur elle correspondît k un secteur

central ayant pour surface — ; les coordonnées des points M seraient donc imaginaires ; par suite, les expressions ulgebnques de XM* ne représenteraient pas en nombres le a carrés des distances vraies.

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