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« pitres cathédraux et les séminaires diocésains, i en ajoutant que tous autres établissements d’utilité publique demeureraient suppritnés. Cette disposition n’a jamais été abrogée, et deux, lois postérieures l’ont même confirmée. »

D’après la loi du S janvier 1817, aucun établissement ecclésiastique n’a la capacité d’acquérir qu’autant qu’il est reconnu par la loi. néanmoins, les frères de la doctrine chrétienne ont été autorisés, on vertu de plusieurs décisions du conseil d’État, à accepter les dons et legs faits avec réserve d’usufruit, nonobstant l’ordonnance du 4 janvier 1S31, qui n’autorise pas les libéralités avec réserve d’usufruit en faveur des établissements religieux. Le conseil d’État a prétendu que, dans l’institution des frères, « le caractère d’établissement d’enseignement dominait le caractère religieux. «

« Il y a en France, dit M. Batbie, quelques ordres qui n’ont jamais été autorisés par des lois et qui subsistent régulièrement en vertu de simples décrets ou ordonnances. On en compte quatre, et ce sont : l« la maison des Missions étrangères ; 2° la congrégation de Saint-Lazare ; 3° celle du Saint-Esprit ; 4° les frères de la doctrine chrétienne. Comment s’expliquent et se justifient ces anomalies ? ■

La confiscation des biens des ordres reli~ gieux, qui a été une source de prospérité pour l’Italie, enrichirait le trésor français de plusiers centaines de millions. Cette mesure serait donc des plus utiles, mais est-elle conforme à la justice ? «Le pouvoir d’autoriser une congrégation religieuse emporte-t-il, dit M. Batbie, le pouvoir réciproque de suppression ? Nous le pensons, et telle est en effet la rèyle écrite dans l’article 6 de la loi du 24 mai 1825. Mais le pouvoir qui les supprime a-t-il le droit de s’attribuer les biens qui leur appartiennent ? Peut-il en changer la destination ? Lorsque l’origine des biens est certaine et que ces biens proviennent de donateurs connus, ils devraient faire retour à ceux qui les ont donnés • ou à leurs héritiers, parce que, dit M. Batbie, > la donation n’était pas pure et simple. Dans leur pensée elle avait pour condition, au moins tacite, l’accomplissement de certains devoirs religieux, et du moment que la charge n’est plus exécutée, il est juste que les biens donnés fassent retour au donateur pour inexécution des conditions. Lors, au contraire, que l’origine des biens n’est pas connue, 1 État doit eu profiter comme de tous les biens vacants et sans maître. À qui reviendraient-ils ? Au donateur ? il est inconnu.

Aux membres de la congrégation supprimée ? ils n’en ont jamais été propriétaires ut singuti. À l’établissement ? il est anéanti et personne ne le continue- »

Examinons les arguments à l’aide desquels M. Biubie conteste à l’État le droit de propriété sur les donations dont les donateurs sont connus. M. Batbie parle d’une condition au moins tacite. L’existence d’une condition quand elle n’est que tacite a besoin d’être démontrée. Mais supposons la condition formelle et précise ; nous n’aurons alors qu’à répéter ce que disait Turgoî au dernier siècle dans V Encyclopédie :

« Je veux supposer qu’une fondation ait eu dans son origine une utilité incontestable... L’immutabilité que les fondateurs ont cherché à lui donner est encore un inconvénient ’ considérable, parce que le temps amène de nouvelles révolutions, qui font disparaître l’utilité dont elle pouvait être dans son origine, et qui peuvent même la rendre nuisible. La société n’a pas toujours les mêmes besoins... Les guerres de Palestine ont donné lieu à des fondations sans nombre dont l’utilité a cessé avec ces guerres. Sans parler des ordres de religieux militaires, l’Europa est encore couverte de maladreries, quoique depuis longtemps on n’y connaisse, plus la lèpre. La plupart de ces établissements survivent longtemps à leur utilité ; premièrement parce qu’il y a toujours des hommes qui en profitent et qui sont intéressés à les maintenir ; secondement parce que, lors même qu’on est bien convaincu de leur inutilité, ou est très-longtemps à prendre le parti de les détruire, à se décider soit sur les mesures et les formalités nécessaires pour abattre ces grands édifices affermis depuis tant de siècles, et qui souvent tiennent à d’autres bâtiments qu’on craint d’ébranler, soit sur l’usage ou le partage qu’on fera de leurs débris ;’ troisièmement parce qu’on est très-longtemps à se convaincre de leur inutilité, en sorte qu’ils ont quelquefois le temps de devenirnuisibles avant qu on ait soupçonné qu’ils sont inutiles. •

11 ne faut pas oublier, en outre, que le3 biens légués aux couvents ont été obtenus souvent à l’aide des manœuvres les plus frauduleuses. Les moines ou leurs agents guettent le lit du mourant et profitent de l’instant où son intelligence est à moitié éteinte pour obtenir, & l’aide de menaces d’un châtiment terrible dans l’autre monde, un testament au profit de ia congrégation.

On invoque en faveur de la non-sécularisation des biens des couvents le respect dû à la volonté des morts. Mais la volonté des morts ne peut pas servir de règle aux vivants, suivant la remarque de ïurgot ; si, depuis la création du monde, chaque mourant avait affecté un terrain à sa sépulture, le sol serait

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couvert de tombes et la culture obligée de s’arrêter devant la volonté des morts.

Ce qu’il y a de plus singulier dans l’argumentation de ceux qui prétendent que les

couvents et les donateurs ont seuls droit sur les donations, c’est qu’ils oublient & dessein de dire que les ordres religieux ne font presque jamais servir l’argent qui leur a été légué au but fixé par les donateurs. Les donateurs ont choisi, «au moins tacitement, » les moines comme distributeurs de leurs legs aux pauvres ; si le don a été conditionnel, l’État a la droit de faire observer lui-même les conditions que les moines n’observent pas. Si le don a été sans condition, le donateur a perdu tous ses droits sur ce don. On ne peut sortir de ce dilemme. »

En matière d’impôt, les moines français sont privilégiés sur leurs compatriotes laïques. Leurs biens, étant des biens de mainmorte, ne sont pas grevés des lourds droits de mutation qui frappent si lourdement ceux des laïques.

En matière d’instruction publique, les ordres religieux sont également privilégiés.

« La surveillance de l’autorité sur les écoles secondaires ecclésiastiques s’exerce, dit M. Batbie, comme si elles étaient des institutions libres. À tout autre point de vue, ce sont des écoles publiques. C est pour cela que les directeurs ou supérieurs sont dispensés de l’impôt des patentes. C’est-à-dire qu on accorde aux religieux le droit exorbitant d’accumuler les privilèges des institutions laïques libres et ceux des institutions laïques publiques, sans être soumis aux règlements restrictifs ni des unes ni des autres.

Aucun brevet de capacité n’est exigé des religieuses pour l’enseignement primaire des filles. L’article 49 de la loi du 15 mars 1850 porte que « les lettres d’obédience tiendront lieu de brevet de capacité aux institutions appartenant à des congrégations religieuses vouées à l’enseignement et reconnues par l’Etat. >

Les lettres d’obédience tiennent de même lieu de brevet de capacité aux directrices congréganistes de salles d’asile (décret du 21 mars 1855).

Les religieux et religieuses, mis ainsi par les lois françaises au-dessus des autres citoyens, ne se croient pas tenus d’observer toujours ces lois. La mendicité est. interdite (art. 274, 275 et 176 du code pénal) ; les ordres religieux la pratiquent impunément. On dit, il est vrai, que les moines ne sollicitent pas l’aumône pour eux-mêmes, mais pour les pauvres qu’ils entretiennent. Ce n’est pas rigoureusement exact, car de quoi le moine

vit-il, sinon des dons des personnes charitables ? Mais en supposant que l’argent mendié par les religieux et religieuses soit destiné aux pauvres, 1 illégalité n’en est pas moins flagrante. Un philanthrope est condamné s’il organise une quête non autorisée. Les moines et les religieux quêtent impunément à domicile, à Paris, sans avoir l’autorisation écrite de l’administration, autorisation exigée par la loi. Les laïques ont mille difficultés pour se réunir ; les congréganistes organisent quand et comme ils veulent des réunions publiques ou secrètes sans jamais ou presque jamais. demander d’autorisation à l’administration. Ainsi les moines ont de fait le monopote de la liberté de quêter et le monopole de la liberté d’association et de réunion. Parmi les ordres religieux dont la situation est illégale, citons en particulier celui des jésuites supprimés par une loi précise, formelle et qui n’a jamais été abrogée.

Les ordres religieux, privilégiés et toutpuissants en France, sont loin d’être favorisés autant dans les autres États de l’Europe. En Italie, ils ont été purement et simplement supprimés par le gouvernement de Victor-Emmanuel. La suppression des couvents était déjà effectuée dans le Piémont lorsque se forma le royaume d’Italie. Cette mesure fut étendue successivement à toutes les parties de l’Italie.

D’autres gouvernements européens, sans décréter des mesures aussi radicales à l’égard des ordres religieux, ont cru devoir opposer des freins à leur liberté illimitée d’action. Citons en particulier l’Allemagne et la Russie.

Eu Allemagne, par décision du ministre de l’instruction publique du 15 juin 1872, les membres des ordres religieux sont exTilus de toute participation à 1 enseignement dans une école publique. L’ordre des jésuites a été banni par la loi du 4 juillet 1872.

Dans le royaume de Pologne, les couvents sont entretenus, depuis 1843, aux frais du

fouvernernent russe, en échange de leurs iens réunis depuis cette année au trésor russe. Depuis 18G4, les couvents catholiques sont soumis à un règlement dont nous citerons un extrait d’ajjrès la brochure intitulée Suppression des couvents dans le royaume de Pologne (Paris, 1865, in-8°) :

« 11 ne peut être rétabli dans les couvents ni séminaires, ni écoles élémentaires, ni pensions, en un mot, aucune sorte d’institution scientifique, soit pour les hommes, soit pour les femmes. Attendu que les couvents et les religieux qui s’y trouvent ont leur entretien assuré en entier par les fonds destinés à cet effot par le gouvernement, il est interdit aux religieux de recueillir des aumônes, c’est-à-dire de faire des quêtes dans les endroits éloignés de leur monastère, ces excursions les dérangeant de leurs pieux exercices et

pouvant donner lieu à des abus et même à des scandales. La quête est uniquement permise dans l’enceinte du couvent lui-même, ainsi que dans ia ville ou dans les limites de la paroisse rurale où il est établi. »

Le recensement des communautés et congrégations de France a été fait pour la première fois en 1861 et publié en 1864, En 1861, elles comprenaient 17,773 hommes et 90,343 femmes, soit un total de 108,000 personnes en chiffre rond.

La publication officielle donne la liste détaillée des établissements religieux existant en France ; mais le chiffre total est passé sous silence. L’abbé Maillagret, dans son Miroir des ordres et institutions religieux de France (Avignon, 1865, 2 vol. in-8°), a décrit environ trois cents ordres religieux existant alors en France ; mais il ne s’agissait que des principaux. Le nombre des ordres religieux de toute catégorie existant actuellement en France est considérable ; ils possèdent plusieurs milliers d’établissements. Il faut aller jusqu’en Asie, dans les États où règne la religion du. Bouddha, pour trouver une accumulation pareille de moines et de religieuses de toute couleur et de toute espèce.

La statistique officielle de 1864 ne donne aucun renseignement sur les couvents et établissements religieux, considérés au point de vue économique. Une portion insignifiante de cette multitude de moines, de religieuses ou de congréganistes de l’un ou de l’autre sexe, exerce quelque industrie, comme la fabrication de liqueurs, la couture, etc. Un nombre un peu plus considérable de ces individus se voue à une profession charitable. L’immense majorité vit exclusivement des sommes données par les fidèles et consomme sans produire. V. congrégations religieuses..

Nous n’avons parlé jusqu’ici que des ordres retigieux chrétiens. Mais chaque religion a ses prêtres et chaque religion aussi a ses moines. • Comme la société chrétienne au iv« et au xe siècle, la société bouddhique s’est divisée, dit Taine, en deux portions : les laïques, classe inférieure, encore engagée dans les liens du monde, du mariage et du travail, incapable d’atteindre au quatrième degré de la sainteté ; les religieux, classe supérieure, sans famille, oisive, ayant renoncé aux biens de la terre et occupée à acquérir des mérites spirituels. Le laïque doit nourrir le religieux, et celui-ci lui fait une grâce en acceptant ses aumônes ; car, quand même un laïque •remplirait des sept joyaux le grand millier des trois mille mondes > et les offrirait à un religieux, toutes ces richesses ne seraient rien comparées aux trésors spirituels dont le religieux lui ferait part en daignant accepter son offrande. Plus le religieux est saint, plus l’offrande est méritoire. Il est plus méritoire de nourrir un religieux que plusieurs milliers de laïques fidèles... Chez les peuples fervents de la Mongolie et du Thibet, on voit les laïques se mettre à genoux devant les religieux d’une sainteté reconnue, pour obtenir d’eux qu’ils veuillent bien agréer des offrandes. On estime l’ensemble des religieux et des religieuses dans le Thibet au cinquième, dans la Mongolie au tiers de la population totale. •

Les-moines de l’Inde ou mounis se sont imposé une vie beaucoup plus rigoureuse que celle des moines chrétiens. ° On ne saurait, dit l’abbé Bertrand, se faire une idée de la multiplicité des tortures que ces malheureux s’imposent. Ceux-ci chancellent sous le poids de lourdes chaînes qui les meurtrissent ; ceux-là s’emprisonnent à perpétuité le cou dans d’énormes colliers de fer ; les uns se suspendent aux arbres par des cordes ou des chaînes et vivent souvent dans cette posture, sans aucun appui pour reposer leurs membres, pendant des mois entiers ; les autres rester* durant plusieurs années au même endroit dans la plus complète immobilité et les yeux tournés vers le soleil. Il y en a qui marchent avec des chaussures garnies intérieurement de pointes acérées ou se font emprisonner dans une cage de fer qui leur enferme tout le corps, depuis le cou jusqu’aux chevilles, de façon qu’il leur est impossible de se coucher ou de s’asseoir. D’autres demeurent les bras élevés au-dessus de la tête, nendant des mois entiers, sans les abaisser jamais, de sorte qu’à la fin, les cartilages s’élant solidifiés, ils ne pourraient plus le fitire, quand même ils le voudraient ; d’autres enfin se font enterrer vivants dans des sépulcres et y restent des semaines entières sans prendre la moindre nourriture. >

Nous ne parlerons pas ici des autres moines non chrétiens. Nous leur avons consacré des articles spéciaux. V. BONZE, derviche, fakir, LAMA, SANTON, etc.

— Bibliogr. C’est par milliers qu’on compte les ouvrages en diverses langues publiés sur les ordres religieux. Nous ne pouvons que renvoyer nos lecteurs à la bibliographie de ces ouvrages, publiée dans l’ouvrage déjà cité d’Hélyot : Dictionnaire des ordres retigieux (Encyclopédie théologique Migne, ire série, t. XX-X.X.M).

—’ B.-arts. I. Peinture. « La peinture, comme tous les autres arts, n’est qu’une des formes do la poésie, a dit Montalembert ; or, comme la poésie religieuse est nécessairement la poésie la plus haute, il s’ensuit que la peinture religieuse occupe nécessairement aussi le premier rang dans le développement de la peinture. « On est assez porto, en effet,

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à considérer cette primauté de l’art religieux comme démontrée par la foule innombrable des chefs-d’oeuvre qu’il a produits..

À l’origine, la peinture se consacra à peu près exclusivement à la décoration des monuments ayant un caractère religieux, à la représentation. des dieux et des héros auxr quels la croyance populaire attribuait les honneurs divins. Les premières idoles n’eu-r rent aucun des caractères qui constituent, à proprement parler, une rouvre d’art ; elles furent tracées d’abord suivant des données hiératiques et, plus tard, conformément aux, descriptions des poètes. ■ De l’astronomie est née la mythologie, a dit Alexandre Lenoir ; les prêtres égyptiens, ceux des Chaldéens, les gymnosopmstes de l’Inde, les mages de la Perse et, longtemps après eux, les philosophes grecs organisèrent la religion et les lois sur la position et la marche respective des planètes, ainsi que d’après les aspects réguliers des autres phénomènes célestes. Si on veut avoir une explication positive des monuments religieux de l’antiquité, c’est le ciel qu’il faut consulter, car la poésie personnifia toutes choses, et les idées métaphysiques s’exprimèrent par des formes et des apparences physiques. Les peintres et les sculpteurs s’appliquèrent à rendre les expressions des postes. » C’est, en effet, du mariage de la Terre avec le Ciel que sont nés tous lesdieux de l’antiquité. En d’autres termes, l’application que l’on a faite des époques de l’apparition des astres aux besoins de l’homme., a l’agriculture et à la navigation, a donné l’existence à ces génies supérieurs que l’on a personnifiés et dont les poètes ont fait ios constellations. C’est ainsi que le Soleil et la Lune, les chefs suprêmes du ciel et de la terre, ont été divinisés ; le premier s’est appelé, suivant les pays et suivant les époques, Osiris, Ormuzd ou Oromnze, Mithra, Remphah, Moloch, Baal, Brohiua ou Vichnou, Jupiter, Apollon, Atys, Adonis, Baechus, Fp, Odin ou Bèlènus ; la seconde s’est nommée Isis, Diane, Cérès, Minerve, Proserpine, Vénus ou Pandore, etc. À ces souverains de l’univers on assigna des compagnons, des ministres, des adversaires, qui furent à leur tour divinisés. Ces différentes divinités, bienfaisantes ou malfaisantes, mâles ou femelles, furent caractérisées par des attributs dont le sens échappait le plus souvent au vulgaire, mais que les artistes avaient bien soin de reproduire suivant les prescriptions^ des prêtres. En Égypte, l’art fut particulièrement asservi aux formules hiératiques et demeura, par suite, uniforme et stationnaire. Pline a constaté que tous les ouvrages d’art exécutés de son temps par les Égyptiens étaient absolument semblables à ceux qui passaient pour avoir été faits des milliers d’années auparavant. Des modifications paraissent toutefois s’être introduites dans les représentations religieuses de ce pays vers l’époque des Ptolémées. Le contact des Grecs, des Perses, bientôt des Romains et dus Juifs devait amener une révolution des idées qui n’aurait pas manqué d’aboutir à une rénovation de lart égyptien, si l’Égypte avait continué de vivre. Mais l’État disloqué, le sacerdoce devenu philosophe, partant hypocrite, tandis que la multitude croupissait dans la plus abjecte superstition, l’autonomie nationale étant perdue, le génie esthétique de la vieille Égypte devait s’éteindre.

Les Égyptiens apportèrent dons lu Grèco la religion au moyen de laquelle ils prétendaient expliquer le système de l’univers et la fécondité de la nature par les aventures qu’ils attribuaient aux dieux. Ils introduisirent en même temps le culte de leurs bizarres idoles. Le3 Grecs so prêtèrent mat à l’adoption des ■ formes bestiales sous lesquelles étaient figurés les dieux de l’Égypte ; mais ils conservèrent assez longtemps dus divinités d’un type imaginaire et monstrueux, telles que la Vénus d’Ainathonte, qui portait la barbe ; l’Apollon Amycléen, représenté sous la forme d’une colonne, avec des pieds, une tête ornée d’un casque et des mains qui tenaient un arc et un javelot ; le Jupiter Patroils, qui avait trois yeux ; la Diane Ephésienne, aux nombreuses mamelles, etc. Tels furent les premiers ouvrages de l’esprit religieux en Grèce. « Si la tyrannie de cette religion se fût maintenue, dit Emeric David (Reckerches sur l’art statuaire), non-seulement elle aurait étouffé les arts, mais bientôt la Grèce, devenue semblable à la triste Égypte, aurait eu, avec lesmêmes opinions, les mêmes maîtres et les mêmes lois. Heureusement, secondé par les arts, le goût général demeura vainqueur do ces dieux bizarres. De nouvelles fables, plus conformes au génie de la nation, firent oublier celles que des étrangers avaient enseignées. Des hommes bieufaisants s’étant rendus célèbres par de grandes actions, on so persuada que des êtres divins les avaient engendrés ou que les dieux eux-mêmes s’étaient revêtus de corps humains pour s’occuper de plus prés du bonheur des hommes. Cette idée urillaute changea tout le système religieux. L’orgueil national et la politique se créèrent, sous des noms anciens, des divinités nouvelles. Ces dieux, enfants de l’imagination des Grecs, ressemblèrent au peuple qui les adorait ; ils furent orgueilleux, passionnés, turbulents comme lui. On dit qu’ils préféraient la Grèce à tout le reste du monde, qu’ils y étaient nés, qu’ils y avaient déposé leur dépouille mortelle, qu’ils avaient aimé les filles