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Les habitants, féroces et fétichistes, vivent du produit de leur chasse et font un petit commerce de peaux et de cuirs bruts.

DAHFOCR, DARFUR, DAR-FOUR ouDAL-EL-FUR, royaume de l’Afrique centrale, a l’extrémité de la Nigritie, borné au N. par le désert de Nubie, à E. par le Kordofan, au S. st au S.-E. par le pays des Chilouks, et à l’O. par le Soudan ; par 11° 16’ de lat. N. et 23<> 30’ de long. E. Ses limites précises ne Jsont pas connues ; superficie, 41,000 kil. carr, ; pop. 250,000 hab. ; cap., Kobbé et Tendelly.

On ne possédait, même en Égypte, que des notions très-incomplètes sur le Darfour avant la publication d’un livre écrit par un Arabe instruit de Tunis, nommé Mohammed-ben-Omar-el-Tounsy (le Tunisien), après huit années de résidence dans le Darfour. Ce cheik remplissait au Caire, en 1832, des fonctions assez analogues à celles d’inspecteur général d’une école de médecine, quand un de nos compatriotes, le docteur Perron, qui était lui-même directeur de cette école, se lia avec lui. Il fut si émerveillé à la lecture du journal de voyage d’El-Tounsy, qu’il conçut la pensée de le faire connaître en Europe, en le traduisant lui-même et en y ajoutant les commentaires et les éclaircissements les plus nécessaires. C’est ce qu’il fit en effet quelques années après, et il publia son travail sous ce titre" : Voyage au Darfour, par le cheik Mohammed-ben-0 : nar-el-Tounsy, réviseur en chef de l’école de médecine du Caire ; traduit de l’arabe par le docteur Perron, directeur de l’école de médecine du Caire (Paris, 1845, Benjamin Duprat, l vol : in-8<> de 492 pages), ouvrage accompagné de cartes et de planches, et d’un portrait du sultan Abou-Madian.

C’est dans ce livre que nous avons puisé les renseignements suivants. Le voyage même est divisé en dix chapitres. Le premier donne la description topographique du Darfour, et des aperçus curieux, sur les mœurs des populations. El-Tounsy évalue la longueur du pays à cinquante jours de marche ; la largeur à dix-huit jours seulement La partie la plus heureuse, la plus fertile, et en même temps la plus barbare, est celle qui s’étend le long de la vaste chaîne des montagnes Marrâh. Le cheik voulut visiter ces montagnes en observateur, et peu s’en fallut qu’il n’eût sujet de s’en repentir. Les habitants, qui n’avaient jamais vu d’Arabe de la couleur d’El-Tounsy, c’est-à-dire à la peau basanée et nuancée de rose, voulurent plus d’une fois le tuer, comme un monstre venu au monde avant terme, et dont la chair devait être excellente à manger. Ces dangers, qui se renouvelèrent souvent, n’ont pas empêché le cheik de faire un tableau charmant de la beauté de ces contrées.

d’artout, dit-il, c’est une culture luxuriante, des eaux courant sur des lits de sable, étincelant d’un éclat d’argent. Chaque vallée, sur ses deux bords, est comme palissadée d’une haie d’arbres et semble inviter le voyageur à ne pas la quitter... Une habitude singulière de ces montagnards est que nul n’épouse une femme avant d’avoir vécu avec elle et d’en avoir eu un ou deux enfants. On dit alors : Cette femme est féconde, et l’homme reste aveu elle en union matrimoniale. Bien que ces montagnards soient constamment avec les femmes, ils sont d’une grossièreté extraordinaire, et c’est là un trait de mœurs qu’on peut opposer à l’opinion des Européens que la société des femmes corrige la rudesse des manières et engendre la politesse. ■>

El-Tounsy expose, dans le chapitre suivant, ce qui touche à l’exercice de la souveraineté au Darfour, aux cérémonies de l’investiture, aux singularités de l’administration. Puis, venant aux marques de respect profond exigées des peuples, il rapporte les suivantes : ■ Toutes les fois, dit-il, que le sultan crache, son crachat est aussitôt essuyé à terre avec les mains par un des serviteurs qui sont devant lui ; lorsqu’il tousse, tout le monde fait ts, is ; lorsqu’il éternue, toute l’assemblée fait entendre un bruit comme le cri du jocko ; quand le sultan fait une course a cheval, s’il tombe emporté par son cheval, tous ceux qui l’accompagnent se jettent à terre ; si quelqu’un reste en selle, on le couche à terre, et il reçoit une volée de coups, fût-il un des personnages les plus élevés. »

Lé chapitre troisième traite des dignités et des emplois. Les principaux ont un nom pris de celui des diverses parties du corps impérial. Ainsi l’un est la tête, l’autre le pied, un troisième le bras, un autre le nombril de Sa Majesté darfourienne. Tous les dignitaires ont pour rétribution le produit de certaines taxes, comme en France les bénéficiaires de la première race. Les fous ou bouffons jouissent de grandes prérogatives ; il n’est pas un seul dignitaire qui n’ait le sien, chargé d’amuser son maître et le peuple partout où se trouve le maître. Passionnés pour la musique, ces barbares forment leur concert d’un mélange de voix humaines, de flûtes et de citrouilles munies de grains.

On voit, au chapitre quatrième, le sultan dans son palais et les habitants dans leurs ■ maisons. Les deux chapitres suivants traitent des vêtements, des mœurs privées, de l’ivrognerie et du libertinage desDarfouriens, et de la condition générale des femmes. Le costume des hommes est en général composé de deux chemises, noires ou blanches, fines

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ou grossières, mais toujours d’une propreté parfaite. Le sultan se distingue de ses sujets par un cachemire en turban, et par une mousseline blanche qui lui enveloppe la tête plusieurs fois, et qu’il ramène sur son visage de manière à ne laisser voir que les yeux. Le vêtement des femmes est beaucoup moins compliqué : c’est pour la poitrine une petite serviette de soie ou de calicot, et pour les reins une bande d’étoffe assez semblable à nos caleçons de bains, si ce n’est qu’elle est moins large. Tout le reste est à nu. Ces dames portent en outre au cou, aux oreilles et dans les narines des anneaux d’or ou de cuivre, auxquels elles suspendent des grains de corail. Les détails curieux dans lesquels se complaît à ce sujet notre philosophe tunisien ne sont pas de nature à être même indiqués légèrement ici. Il y a cependant une excellente coutume au Darfour : les femmes n’y sont pas sujettes au déshonneur ; l’homme seul qui en abuse est considéré comme coupable. Plus loin l’auteur donne des détails sur les fiançailles et les noces, les sept espèces de danses qu’on exécute, et les différents jeux symboliques auxquels se livrent les invités. Une autre coutume témoigne chez ces peuples d’une singulière délicatesse. Dans l’intérieur des familles, c’est un défaut de-convenance pour une femme de manger devant son mari. Pendant qu’elle est à table, si l’époux revient, elle doit se lever précipitamment et disparaître. « Manger, disent les Darfouriens, ouvrir la boucha et y mettre de la nourriture devant son mari, c’est le comble de la honte. »

El-Tounsy ne peut se résoudre à quitter le sujet des femmes, des eunuques et du harem ; il fait, en bon Tunisien, l’apologie éloquente de l’usage des eunuques, et il en démontre la parfaite nécessité par une foule d’arguments puisés dans l’intérêt bien entendu de ceux qui emploient ce genre de serviteurs. On remarque, dans le huitième chapitre, la simplicité de la pratique ordinaire des accouchements au Darfour, « Lorsqu’une femme ressent les premières douleurs de l’enfantement, plusieurs vieilles se rassemblent chez elle pour la secourir. Elles attachent une corde a un endroit élevé de la hutte ; la femme se tient debout, saisit entre ses mains l’extrémité pendante de la corde, et s’en fait un point d appui à chaque crise des douleurs. La patiente reste ainsi debout jusqu’à ce qu’elle soit accouchée. » C’est un procédé d’une simplicité toute primitive, que nous livrons aux méditations de nos praticiens.

L’auteur passe ensuite à l’histoire naturelle de la contrée, aux différentes espèces de chasse et de pêche, et aux nombreux systèmes d’échange. En général, on ne connaît pas au Darfour les pièces d’or, d’argent et même de cuivre. On admet pour monnaie courante des anneaux d’étain, des pièces de coton d’une certaine forme consacrée, des verroteries, des tiges de tabac, des liasses de fil de coton, etc.

El-Tounsy termine son récit par l’énumération très-sérieuse de tous les genres de sorcellerie et d’enchantement connus des peuples du Darfour. Il y en a d’incroyables, mais auxquels El-Tounsy ne paraît pas refuser de croire. Ainsi il dit qu’au Darlour il est des herbes qui, réduites en poudre, répandent le sommeil sur tous ceux qui habitent une maison dès qu’on en jette quelques pincées sur les murailles ; c’est avec ce secret que l’on avait, au temps des fées, endormi tous les gens de la Belle au bois dormant. Mais ce n’est pas là ce qu’il y a de plus extraordinaire : d’autres herbes rendent ceux qui savent s’en servir invisibles, inaccessibles an feu, enfin invulnérables, etc. Le cheik parle de tout cela en homme qui n’y trouve rien à redire. ■ C’est la partie la moins philosophique de son ceuvre, car il va jusqu’à raconter qu’il a vu de ses propres yeux un grand nombre de Darfouriens métamorphosés par l’effet de quelques-unes de ces herbes en lions, en tigres, en loups, en chats et en chiens. On ne sait vraiment en cet endroit s’il ne veut pas se moquer du lecteur ; mais la tranquillité avec laquelle il écrit ces choses ne semble indiquer aucune ironie, et l’on sent en le lisant que l’histoire de l’Ane de Lucius de Patras, et d’Apulée, s’il la connaissait, devait lui paraître, non une fiction, mais une réalité toute naturelle. C’est dans le sable surtout qu’on trouve les moyens de connaître les secrets de l’avenir. Il suffit d’y tracer quelques caractères en prononçant certaines paroles. Le cheik donne la recette, et l’on n a qu’à l’expérimenter.

La langue du Darfour ou langue fourienne, qui fait partie du groupe des langues du Soudan ou de la Nigritie intérieure, est parlée par tous les indigènes du Darfour qui ne parlent pas l’arabe ; cette dernière langue du reste est comprise de presque tous les habitants de ce pays, et elle est la seule qui soit employée dans la correspondance par lettres, peu fréquente à la vérité. La langue fourienne, dont on a un vocabulaire assez étendu, paraît dérivée du berber, mais elle a plus d’un cinquième de ses mots qui sont arabes ou dérivés de l’arabe, entre autres, toutes les dénominations d’objets de métaphysique, à l’exception du nom de la divinité, ainsi qu’en général le nom de tout ce qui tient à l’état politique. On pourrait y distinguer deux dialectes principaux : le darfour proprement dit, parlé dans le Darfour, et le kordofan, parlé

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dans le Kordofan, royaume jadis vassal du sultan de Darfour, et maintenant du vice-roi d’Égypte.

DARGAUD (Jean-Marie), littérateur et historien français, né en 1800 à Paray-le-Monial (Saône-et-Loire), mort en 1865. Il ht ses études de droit h Paris ; mais contraint, par l’altération de sa santé, d’abandonner la carrièredu barreau, il se livra entièrement à son goût pour les lettres. Ame droite, religieuse et tendre,

Ïiassionnée pour les idées de justice et de toérance, Dargaud s’est révélé tout entier dans ses ouvrages, écrits en un style qui rappelle la manière de Lamartine, dont il était 1 ami. Outre des traductions des Psaumes de Job et du Cantique des cantiques, il a publié : la Solitude (1833) ; Georges ou Une âme dans le siècle (1840, 2 vol.) ; Histoire de Marie Stuart (1850, 2 vol.), œuvre remarquable à tous égards ; la Famille (1853) ; Voyage aux Alpes (1853) ; Histoire de la liberté religieuse en France et de ses fondateurs (1859, 4 vol.), son ouvrage capital, dans lequel il défend la liberté de conscience avec une chaleureuse éloquence ; Voyage en Danemark (1861) ; Histoire de Jane Gray (1862), etc.

DARGENTEUIL (N.-Arnaud), homme politique français, né près de Matha (Charente-Inférieure) en 1791, mort en 1849. Il exerçait la profession de médecin à Saintes, lorsque

!a révolution de 1848 éclata. Il s’était déjà fait

remarquer par ses opinions avancées à l’occasion du banquet patriotique qui fut offert, en 1847, àM. Crémieux, par les démocrates de cette ville. Placé à côté de l’illustre avocat : « J’ai envie, dit-il, de monter sur la table et de crier : Vive la République ! car elle ne peut tarder à venir. » En 1848, il fut nommé représentant ce la Charente-Inférieure à l’Assemblée constituante, par 40,384 suffrages ; mais il joua un rôle assez effacé dans cette assemblée, où la mort du reste ne lui permit de siéger que quelques mois.

DARGEISVILLE (Antoine-Joseph Dézaluer), naturaliste français. V. Dézallier.

DARGOMYSKY (Alexandre Serguéievitch), musicien russe, né dans un village du gouvernement de Toula, non le 2 février 1813, « au moment de la retraite de l’armée française, » comme le dit M. Fétis, mais en 1819 ou 1820, ainsi que cela résulte d’une notice publiée en 1864 par un de ses compatriotes, M. J. Gall. Une particularité à noter en ce qui concerne l’enfance de M. Dargomysky, c’est qu’il ne commença à parler qu’à l’âge de cinq ans et que jusqu’alors ses parents le crurent muet. Dès ses plus jeunes années, il fut conduit à Saint-Pétersbourg, afin d’y faire son éducation. Il montra de bonne heure, diton, un goût particulier pour les arts, et principalement pour le théâtre. À sept ans, on le mit entre les mains d’un maître de piano. Un peu plus tard, il s’adonna à l’étude du violon et acquit vite une grande habileté sur cet instrument. Il était à peine âgé d’une quinzaine d’années qu’il écrivait quelques duos concertants pour piano et violon et un certain nombre de quatuors. Ses parents, voulant alors encourager sa vocation, le confièrent aux soins’de Schoberlechner, pianiste et compositeur distingué, qui lui enseigna l’harmonie et le contre-point. A l’âge de dix-huit ans, il entra au service de l’État, et accepta un emploi au ministère de la maison de l’empereur, sans interrompre ses études, qui d’ailleurs touchaient à leur fin, et sans renoncer à se faire entendre dans les salons, où son intelligence de pianiste lui faisait obtenir de véritables succès. Doué d’une intelligence musicale peu commune, il se vit promptement recherché comme accompagnateur par les chanteurs les plus distingués. C’est dans l’exercice de cet art délicat et difficile de l’accompagnement qu’il acquit la connaissance du timbre et de 1 étendue des voix, et qu’il se passionna pour la musique vocale et dramatique, pour laquelle il abandonna complètement la musique instrumentale. Il se mit alors à écrire une quantité considérable de romances, de mélodies, d’airs, de cantates, de morceaux d’ensemble avec accompagnement de piano ou de quatuor. Un certain nombre de ces compositions ont été gravées et publiées à Saint-Pétersbourg.

Il se démit bientôt de son emploi au ministère et se livra pendant plusieurs années à des méditations sérieuses sur son art à l’étude approfondie de divers ouvrages de théorie, à la lecture attentive des partitions des maîtres anciens et modernes, tout en composant plusieurs ouvrages qui furent aussitôt en grande faveur auprès des dilettantes jnoscovites. Il entreprit ensuite un grand voyage à l’étranger, parcourut l’Allemagne, la Belgique et la France, séjourna quelques mois à Paris, puis retourna à Saint-Pétersbourg, dont il continua de faire sa demeure habituelle, et où il s’est acquis la réputation d’un musicien fort distingué. Peu de temps après son retour en Russie, en 1848, M. Dargomysky fit représenter au Théâtre-National de Moscou un frand opéra en quatre actes, Esméralda, ont le poème était imité de celui que Victor Hugo avait écrit pour Mlle Louise Bertin. En parlant de YEsméralda de M. Dargomysky, M. Fétis dit « qu’une remarquable originalité d’idées et de style distingue cette production, » et M. Gall constate que c’est ■ un ouvrage bien écrit, dans lequel on trouve des morceaux d’ensemble d’une con DARI

ception de véritable artiste, à Ce dernier crttique apprécie en ces termes le talent du compositeur russe : « M. Dargomysky diffère essentiellement de Glinka par la contexture de sa musique, plus forte de facture et plus analogue aux formes générales da l’art actuel, plus dramatique aussi, au point de vue de la passion, mais moins originale, moins russe que la Vie pour le tzar. »

Parmi les innombrables compositions de M. Dargomysky, on remarque les suivantes, qui ont été ou publiées ou exécutées à Saint-Pétersbourg : douze recueils de pièces brillantes pour le piano, telles que variations, fantaisies, trios, scherzi, etc., avec ou sans accompagnement : Grand boléro et Grande valse patriotique, Galop bohémien pour orchestre ; soixante morceaux de chant détachés, avec accompagnement de piano, tels que romances,

chansons, cantates, ballades, mélodies et morceaux d’ensemble ; la Fête de Baccbus, grande cantate écrite sur un poSme de Pousehkine, composition très-considérable, formée de huit morceaux, à grand orchestre, avec chœurs et solos de chant.

DARHIM s. m. (da-rimm). Métrol. V. dir-

HEM.

DARIABADIT s, m. (da-ri-a-ba-di). Comm. Sorta#de coton des Indes. f,

DARIANGE s. m. (da-ri-an-je). Bot. Arbre résineux des îles Philippines.

DARIB s. m. (da-rib). Métrol. Mesure de capacité usitée en Égypte, où elle sert à mesurer le riz, et valant à Rosette, 221 lit. 7002, à Damiette 321 litr. 0831 : Le darib se fabrique ordinairement en fer-blanc, en forme de cane tronqué.

DARIDA, géant de la mythologie indienne, qui osa défier Itchora (Siva) au combat et fut, après une lutte terrible, tué par Bhadra-Kali, incarnation de Bhavani.

darider v. n. ou intr. (da-ri-dé). Patois. Aller et venir vivement, courir çà et là.

DARIEL (défilé de), autrefois Caucasiœ pylœ, défilé de la chaîne du Caucase, gardé par un poste russe. Ilestsituéprès de la source du Tereck, sur la route de Tiflis à Mozdok, et fait communiquer l’Europe à l’Asie. La route qui longe ce défilé, commandée par un fort, est située à 1,134 mètres au-dessus du niveau de la mer.

DARIEN ou URABA (golfe de), dans la mer des Antilles, sur la côte septentrionale de la Nouvelle-Grenade, entre les départements de Magdalena et de l’Isthme, limité à l’O. par le cap Braha et à l’E. par celui de Mamon, par 7050’— 10012’ de lat. N. et 77<>55’

— 79» de long. O. Les côtes sont hérissées de rochers et accessibles seulement vers l’O. et le S. L’isthme de Panama est quelquefois appelé isthme de Darien.

DARIEN (colonie nE), fondée par un Ecossais du nom de Paterson, qui, vers 1680, visitant le nouveau monde, se trouva, à l’isthme de Darien ou de Panama, en contact avec Dampier et d’autres boucaniers, alors au comble de leur puissance. Il apprit d’eux qu’il existait sur l’isthme un pays non encore occupé par les Espagnols, fertile, riche en or et en métaux précieux, facile à aborder et à défendre, possédant un havre excellent et habitable pour les hommes du Nord, à cause d’une chaîne de montagnes où la température était d’une délicieuse fraîcheur. On ajoutait que ce pays, placé sur un point de l’isthme où le passage d’un océan à l’autre peut s’effectuer en une journée, semblait prédestiné par la nature à devenir le grand chemin du commerce de l’univers. Paterson se rendit sur les lieux, les étudia et conçut aussitôt le projet d’y fonder une puissante colonie. Son idée était de préparer, sous la protection d’un gouvernement fort, une expédition assez imposante pour faire, sans coup férir, la conquête du territoire et pour y implanter les institutions civiles et religieuses du pays d’où elle émigrerait. Il soumit successivement son projet au gouvernement anglais, à la Hollande, à la ville libre de Hambourg et à l’électeur de Brandebourg, sans trouver les encouragements qu’il espérait. Enfin, de concert avec Flechter de Saltoun, Paterson se rendit en Écosse, où son projet fut adopté par les plus puissants des nobles du pays. En juin 1693, le parlement accorda et le roi ratifia une charte autorisant une compagnie commerciale à établir des colonies et à construire des forts, en Afrique et dans le nouveau monde, avec le consentement des indigènes, et dans des lieux non occupés par d’autres nations européennes. Les actions de la société nouvelle s’enlevèrent avec une rapidité merveilleuse ; toutes les classes de la société voulurent participer à l’entreprise. Le fonds social atteignit bientôt le chiffre de 400,000 livres sterling (10 millions de francs), succès extraordinaire, si l’on songe qu’à cette époque la somme du numéraire, dans tout le royaume d’Écosse, ne dépassait pas 800,000 livres sterling (20 millions de francs). Il fut recueilli, de plus, des souscriptions pour 7,500,000 francs en Angleterre et pour 5 millions en Hollande.

Ces heureux débuts et les résultats qu’on était en droit d’en attendre excitèrent la jalousie de la compagnie des Indes orientales. Elle fit si bien, que le parlement anglais prit, contre l’entreprise, des mesures très-sévères, et que les négociants de Londres, des Pays-Bas et de Hambourg annulèrent leurs sous-