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Page:Lavergne, Jean Coste - 1908.djvu/29

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aussi. Dans le silence et l’obscurité, on n’entendit bientôt plus que grincer les essieux de la voiture, la pluie s’écraser, en larges gouttes, contre les vitres, et sonner, par saccades, Les grelots des chevaux, dans le roulement sourd de la diligence sur la route détrempée.

Il était près de six heures, lorsqu’ils descendirent à Maleval. Il faisait nuit close ; heureusement, il y eut une éclaircie au ciel ; entre une percée de nuages, comme au fond d’un étang bleu, ourlé d’argent, rayonna la lune. Elle éclaira une grande rue de village, trouée de flaques d’eau miroitantes et flanquée de maisons basses et sombres.

Jean pria la patronne du café, devant lequel la diligence s’arrête pour relayer, de lui indiquer un hôtel. À ce mot, la bonne femme ouvrit de grands yeux et garda le silence.

— Je suis le nouvel instituteur, — dit Coste en réitérant sa demande.

— Ah ! mon brave monsieur, une auberge ?… Mais il vous faut aller à l’extrémité du village ; tenez, là-bas.

Elle tendit l’index vers le trou noir de la rue, car la lune venait de se cacher.

— Attendez, reprit-elle, le petiot va vous y mener…

Elle appela :

— Pierrou, Pierrou !

Un petit bonhomme de huit ans, les cheveux embroussaillés, apparut dans la lueur rouge des lanternes, suçant ses doigts à pleine bouche.

Coste lui tapota la joue, amicalement. Quelques pas plus loin, il interrogea en vain le marmot. De nouveau, dans le silence de la rue, Louise et lui traînèrent les enfants, mal réveillés, dormant debout, trébuchant dans l’obscurité ; ils pataugeaient dans des flaques, s’éclaboussant les uns les autres.

— Oh ! mon Dieu ! mon Dieu ! — répétait Louise excédée, d’une voix lasse.