Page:Lavignac - Le Voyage artistique à Bayreuth, éd7.djvu/68

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maintenant tout étourdi. Une seule pensée me vint : amener le public à comprendre et à participer à mes vues, et faire son éducation artistique. »

Les musiciens ne furent pas plus indulgents pour lui que le vulgaire. Mendelssohn, Spohr et Schumann critiquèrent vivement l’ouvrage, tout en reconnaissant qu’il renfermait çà et là de bonnes choses. Schumann alla même jusqu’à écrire à son sujet, en 1853 : « C’est de la musique d’amateur vide et déplaisante ! » Spohr, à la même époque, avoue pourtant que « l’opéra contient certaines choses nouvelles et belles que tout d’abord il n’aimait pas, et qu’il s’était habitué à plusieurs parties ».

L’année qui suivit, 1846, fut troublée pour Wagner par de nouveaux soucis de toutes sortes ; la publication de ses opéras Rienzi, le Vaisseau fantôme et Tannhauser l’entraînèrent dans de désastreuses complications financières ; puis il se lança à cette époque dans la politique et se fit de nombreux ennemis ; la presse devint de plus en plus sévère pour lui et influença les directeurs de théâtre, qui refusèrent de jouer ses œuvres, le regardant comme un excentrique et un personnage difficile à vivre.

Se retirant alors pour un temps des agitations politiques, il reprit activement son nouvel ouvrage Lohengrin, à peine ébauché en 1845 et dont le sujet lui avait été fourni, comme celui de Tannhauser, par W. d’Eschenbach. Il y travailla tout en comprenant qu’il s’éloignait plus que jamais du goût actuel du public, uniquement engoué, à ce moment, des opéras de Donizetti. La direction du théâtre de Dresde s’en rendit si bien compte aussi qu’elle en remit indéfiniment l’exécution, et que la seule partie de l’œuvre que put entendre son auteur à cette époque fut le finale du premier acte, exécuté en septembre 1848 pour l’anniversaire de l’inauguration de la chapelle royale.