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les épis

L’arbre semble un oiseau qui va ployer ses ailes.
Oh ! s’ils pouvaient l’atteindre et sous ses grands rameaux
Dormir, longtemps dormir, pour oublier leurs maux !

Elle pleure toujours, la belle Égyptienne,
Et la main d’Ismaël brûle et tremble en la sienne.
Où vont-ils ? Qui pourra, s’ils meurent, les trouver ?
L’enfant tombe souvent. Il ne peut achever
Sous l’implacable ciel sa longue course. Il râle
Et sa débile main cherche sa lèvre pâle,
Comme pour étouffer ce bruit qui lui fait peur.

Agar est, par instant, plongée en la stupeur,
Et, par instant, ses cris navrent la solitude…
Mais voilà que soudain, trompant sa lassitude,
Elle prend dans ses bras l’enfant qui va périr
Et, regardant au loin, afin de mieux courir,
Le palmier qui s’estompe au fond du ciel de flamme,
Elle s’élance.
Elle s’élance.Enfin, le désespoir dans l’âme,
Le regard obscurci par un sanglant rideau,
Sous l’arbre elle s’affaisse avec son doux fardeau.

Mais elle se relève. Il faut qu’Ismaël vive !
Il est peut-être ici quelque source d’eau vive.