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les épis

Un dimanche pourtant… le jour de Pâques même,
Oublieux et distrait, je laissais sans remords
Mon esprit vagabond s’envoler au dehors,
Sur le rayon de feu qui rosait la fenêtre,
Pendant que tous priaient, et le peuple et le prêtre.
Cependant nulle fleur ne s’ouvrait sur les prés,
Nul vent ne déchirait les nuages nacrés,
Et les blanches vapeurs qui montaient de la plaine
Ressemblaient à l’encens dont l’église était pleine,
L’encens du Maître Autel ardent comme un bûcher.

La clochette tinta. Puis, je vis se pencher,
Les yeux mouillés de pleurs, sur le sacré calice,
L’officiant pieux. Le divin sacrifice,
À l’instant même, allait s’accomplir derechef.
Un murmure passa. Je jetai, dans la nef
Où la foule chômait la plus grande des fêtes,
Un long regard, pour voir le mouvement des têtes.
Ces fronts qui s’inclinaient, c’était, me sembla-t-il,
Comme les lourds épis, ou comme le blond mil,
Lorsque passe le vent.
Lorsque passe le vent.L’orgue chantait sonore.
Je veux voir l’Homme-Dieu que ce bon peuple honore,
L’Homme-Dieu dans l’Hostie. Aussitôt, mon regard
Effleure, dans son vol, peut-être par hasard,