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vision

Émerger lentement des océans de brume.
Oh ! qu’ils sont doux et chers tous ces riens qu’on exhume
Des ans jadis vécus !
Des ans jadis vécus !J’étais enfant de chœur.
J’allais servir la messe, et je savais par cœur
Le psaume Introibo qui se dit à voix basse,
Au pied de l’autel saint. Je l’appris à la classe.

« Oui, je m’approcherai de l’autel de mon Dieu,
Du Dieu qui réjouit ma jeunesse… »
Du Dieu qui réjouit ma jeunesse… »Au milieu
Des enfants en surplis alignés dans les stalles,
Je priais assez peu, car les molles spirales
De l’encens qui montait vers le Dieu souverain,
Les versets alternés des chantres au lutrin,
Les murmures moelleux de l’orgue, la prière
Du vieux prêtre à l’autel, de la foule ouvrière
À genoux dans la nef sur le parquet de bois,
Tout cela me troublait, et c’était, chaque fois,
Un spectacle nouveau qui remuait mon âme.

J’aime à le rappeler. Que celui-là me blâme,
Qu’il me juge bigot ou trop sentimental,
Qui ne se souvient plus du village natal,
Ni du clocher béni qui sonna son baptême.