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les épis


Ô chrétiens, croyez-vous à ce Dieu fait poussière ?
À l’éternel Esprit sous cette chair grossière ?
À l’infini pouvoir dans ces débiles mains ?
Croyez-vous à l’amour sans fin et sans mesure ?
Au cœur inassouvi qui rend avec usure ?…
Ô chrétiens, croyez-vous au rachat des humains ?

La cloche des beffrois sonne à toute volée…
Sur le flanc des coteaux, au fond de la vallée,
Brûle joyeusement, dans l’âtre des aïeux,
La bûche de sapin. Les maisons s’illuminent,
Courbés sur leur bâton, les vieillards s’acheminent,
Évoquant tour à tour des souvenirs pieux.

Mais déjà tout bruit meurt sous les voûtes du temple,
L’adorateur s’en va. Le ciel ému contemple
Le flot impétueux des inconstants mortels.
Les cierges sont éteints. Par les fenêtres sombres
On voit quelques rayons se perdre dans les ombres…
C’est la lampe qui veille au milieu des autels.

Les croyants sont partis par des routes diverses,
Et des suggestions habilement perverses,
Comme des traits brûlants traversent les esprits,