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à la « braierie »

« Flammes qui me brûlez, oh ! dormez sous la cendre,
Le beau jour va finir, et la nuit va descendre…
Le beau jour des amours, et la nuit des chagrins !
Flammes, ne mordez pas le lin aux chastes brins !
Flammes, ne brûlez point le chanvre qui parfume !
Ne brûlez plus mon cœur que la douleur consume !

Au-dessus du travail, comme un brouillard subtil,
Flottaient des filaments, des aigrettes de fil,
Des atômes d’étoupe, une grise poussière,
Qui s’en allaient, mêlés, se perdre à la lisière
Du bois voisin, tout noir de sapins résineux.

Dans un moelleux essor, formant d’étranges nœuds
Que déliait un souffle à travers la ramée,
Lentement s’élevait la bleuâtre fumée
Du foyer pétillant que Simone attisait.
Aux instants de repos, quand le bruit se taisait,
On entendait les bœufs mugir dans la prairie,
Et la source chanter auprès de la braîrie.
Un rayon de soleil, comme un lumineux dard,
Plonge soudainement dans le léger brouillard,
Et fait une trouée où l’atôme étincelle,
Où la poussière d’or tourbillonne et ruisselle.