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les épis


« Cabane, lit de mousse, humble feu de fagot,
Mânes de mes aïeux errant sous les grands arbres,
Pourquoi vous ai-je fuis ?… Il se nommait Bigot !
Cabane, lit de mousse, humble feu de fagot,
Vous valiez bien des fois ses palais et ses marbres.
Il m’a perdue hier par des menteurs discours ;
Il te perd aujourd’hui dans de funestes luttes,
Ô mon pays aimé ! Nos triomphes sont courts ;
Pauvre Stadaconé, pleurons, pleurons nos chutes !
Cabane, lit de mousse, humble feu de fagot,
Pourquoi vous ai-je fuis ?… Il se nommait Bigot ! — »

Bigot, marchand d’honneur, parvenu dont l’empire
S’étendait sur la ville et sur les champs ; vampire
Qui buvait notre sang et mangeait notre chair ;
Fripon qui nous volait et nous revendait cher ;
Bigot avait hâté, par sa filouterie,
La honte de la France et de notre patrie.
Il était le dernier, mais aussi le plus vil
De tous ces affamés de plaisir, que l’exil
Ne punit pas assez. Il laissa des ruines.
On entrevoit encore, à travers les bruines
Qu’un vent mystérieux traîne sur le passé,
Son galbe de félon aux fanges du fossé.