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par droit chemin


Le temps fuit. Nous marchons, Messieurs, avec vitesse.
Ils sont bien loin déjà ces jours pleins de tristesse,
Où tous, nous semblions des étrangers chez nous.
La France nous a vus, tout un peuple, à genoux,
Quand son vieux drapeau blanc, vaincu, plia son aile.
Une plainte a monté profonde, solennelle,
Des plaines d’Abraham où tombaient nos guerriers.
Les traîtres de ces temps, et les aventuriers,
Les spadassins titrés et les héros de bouge,
Par la main du bourreau sont marqués du fer rouge.

Les méchants n’ont qu’un jour de gloire. Ils sont maudits.
Le palais de Bigot, comme un sale taudis
S’est écroulé là-bas. Au fond de ce repaire
Va se coucher le loup, va siffler la vipère.
L’hôte n’a pas changé. La fille des Hurons
Dort son dernier sommeil aussi. Les bûcherons
Ont rasé la forêt qui dérobait sa cendre.
À son heure suprême a-t-elle vu descendre
Sur son lit de rameaux l’ange saint du pardon ?

Et nous avons cent ans gémi dans l’abandon.
Ils sont loin ces jours pleins de douleur et de honte.
Pour instruire ses fils le père les raconte,