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tonkourou


C’est le temps du brayage. Un grand feu de sarments
Brille là-bas, au pied des fiers escarpements.
Un ruisseau, près de là, roule ses eaux mutines.
Sur un large échafaud formé de perches fines,
Au-dessus du foyer, le lin est étendu ;
Il sèche sous les soins d’un gardien assidu.



Quelle est dans ce doux nid cette troupe joyeuse.
Entre toutes quelle est la plus belle brayeuse ?
La plus belle est Louise. Et depuis le matin
Volent ses gais propos et son rire argentin.

Près d’elle tout le jour ses compagnes, pareilles
En leur empressement, aux actives abeilles,
S’en viennent tour à tour au fragile échafaud
Prendre à grande poignée un lin aride et chaud.
Et l’on entend au loin, sous les hautes futaies,
Sans cesse retentir le claquement des braies
Qui battent le lin mûr en cadence et sans fin.
Les aigrettes d’étoupe, un flot de duvet fin
Couvrent d’un manteau d’or les jeunes travailleuses ;
Et les éclats de rire et les chansons railleuses
Montent avec le bruit des instruments actifs.