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tonkourou

Longtemps les supplia de se sauver tous deux.

— Renoncez, faisait-il, à ces plans hasardeux,
Que pouvez-vous, ô ciel ! contre une armée entière ?

Chénier lui dit enfin, courbant sa tête altière :

— Priez pour nous ; tantôt nous serons devant Dieu.

— Pour que la liberté germe un jour en ce lieu,
Ajouta le marin, du sang est nécessaire.

Ces choses que je dis une bouche sincère
Me les conta cent fois après l’événement.
Je n’étais pas au bourg, en effet, au moment
Où s’y passait, hélas ! cette scène d’angoisse ;
Mais j’arrivai bientôt. De plus d’une paroisse
Vinrent en même temps de vigoureux garçons.
Chénier pleura de joie.
— Ah ! j’avais des soupçons,
Dit-il, serrant la main aux nouveaux militaires.

— Commandant, nos retards ne sont pas volontaires,
Répondit l’un d’entre eux — nos mères pleuraient tant.