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Il s’en remet à sa vitesse, à son rare talent pour dépister les chiens, par ses ruses, en se blottissant, perdu au sein d’impénétrables fourrés, de savanes inaccessibles. La meute épuisée de fatigue, abandonne souvent la poursuite ; le timide animal n’a plus qu’un ennemi à éviter, le chasseur embusqué avec son fusil sur le sentier de la montagne, où le lièvre est sûr de passer.

Lorsqu’une épaisse couche de neige blanchit le sol, Lepus, monté sur les raquettes que la nature lui a données, y laisse à peine une légère trace, tandis que le chien de chasse fatigué, haletant, y enfonce chaque pas jusqu’au ventre ; adieu, sire, pour ce jour-là.

Bien différent du lièvre d’Europe, le nôtre trouve sa nourriture dans la forêt, loin des champs de navets ou de choux de l’agriculteur. En été, il se nourrira d’herbe tendre, de feuilles, de bourgeons et de l’écorce de certains arbustes. En hiver, le comestible est plus rare, alors, il compte sur l’écorce des saules, du bouleau, du peuplier noir, sur les bourgeons des jeunes pins. Le lièvre du Canada en quête d’aliments, sort à la brunante ou aux premières heures de la nuit, l’automne et l’hiver. En été, il n’est pas rare de rencontrer, le matin ou vers le soleil couchant, un lièvre, explorateur solitaire, suivant cotuleusement son sentier chéri, sur le versant de la colline : alarmé, il frappera bruyamment le sol de ses pattes de derrière : se réfugiera dans le fourré à quelques mètres du sentier, où il se blottira, les oreilles droites, assis sur ses hanches et écoutant, pour découvrir s’il est poursuivi. Ce bruit fait avec ses pieds sur le sol se répète aussi quand le lièvre rôde la nuit : c’est un indice de crainte aussi bien que le signe de provocation des mâles à leurs rivaux, à la saison des amours. On assure que le lièvre fréquente le même bois, le même sentier pendant plusieurs années