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plaines historiques d’Abraham où se décida le sort d’un continent, et mille autres localités célèbres.

J’avais vu et revu ces merveilles ; j’avais admiré tous les romanesques points de vue de la vieille cité : il me fallait d’autres amusements. La période des grandes chaleurs approchait ; la plupart des familles aisées avaient pris la clef des champs ; des essaims de citadins s’étaient envolés aux grandes stations balnéaires : Cacouanna, Murray Bay, Métis, Rimouski.

Un jour que je reposais nonchalamment, dans la salle de lecture du Club Stadacona, entouré de Revues et de journaux (le club de la garnison lui a succédé), le garçon de service me remit un billet, où je lus « Le Jacques Cartier est à point pour la pêche ; les eaux baissent ; la truite saute comme une bénédiction ; venez avec le postillon de mercredi sans faute. » (Point de voie ferrée alors dans le voisinage, çà va sans dire). Ô bonheur, m’écriai-je, vite, préparons canne à pêche, lignes, hameçons, mouches !

Le mercredi suivant, à midi sonnant, j’avais rejoint à sa modeste hôtellerie, au pied de la côte d’Abraham, l’alerte postillon, dont le buck-board attendait à la porte.

Ce fonctionnaire était un farceur du nom de Charley ; espèce de Lovelace suranné, qui avait pris femme à son retour des mines de la Californie.

« Montez en place, me dit-il, brusquement ; l’Angelus vient de tinter ; la poste de Sa Majesté ne retarde pour personne, vous prendrez le temps plus tard de faire les yeux-doux à Jane. Jane était la jolie fille de comptoir, de ce repos des voyageurs. Puis, il entra dans l’hôtellerie, un bruit comme si deux personnes s’escrimaient, frappa mon oreille et la voix vibrante de Jane se fit entendre, « Charley, abominable vaurien que vous êtes, si vous essayez une seconde fois de vos farces, j’en préviendrai votre épouse. »