Page:LeMoine - Chasse et pêche au Canada, 1887.djvu/51

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une platine d’argent ; car la flamme, au besoin, devra être fort vive. La lanterne doit être pourvue d’un couvercle ou abat-jour, si effectif, qu’il ne puisse s’en exhaler au dehors jusqu’au moment voulu, la moindre lueur. Car l’orignal n’est pas comme le chevreuil, qui, à la vue d’un objet nouveau, reste immobile, ébahi ; l’orignal ne devient pas la victime de sa curiosité ; il ne se hasardera à scruter ce qu’il voit pour la première fois que lorsqu’il se croira en lieu sûr.

La chasse dont il s’agit se fait à deux. Les chasseurs après avoir allumé leur lanterne se blottiront dans leur pirogue dont le fond sera muni d’une couverte pour assourdir le bruit de leurs mouvements.

Celui qui doit tirer, se place sur le devant du canot ; son compagnon le masquera au moyen d’une couverte. Puis, il assujettira la lanterne à un support en arrière du tireur, mais en droite ligne avec, et reliée à, sa tête, en sorte que la flamme une fois exposée en suive tous les mouvements. Quand il visera, ce rayon, la visière, le guidon de la carabine et l’objet visé seront en ligne : tout ce que requerra le chasseur, ce sera une vue distincte de l’orignal.

Ceci réglé, le second chasseur, replie sa propre couverte sur ses genoux et assis à l’arrière, de sa pagaie, il pousse au large… L’abat-jour étant replié sur la lanterne, il s’en suit une obscurité complète ; un silence parfait règne à l’entour, afin que les chasseurs, les oreilles tendues puissent saisir la moindre indication de la présence du gibier. L’exercice empêche celui qui pagaie de trouver le temps long ; il n’en est pas ainsi du tireur aux aguets, n’osant remuer, ni faire le moindre bruit. Il écoute, écoute… Tout le fatigue, l’ahurit : tantôt, c’est la chute d’une feuille sèche — tantôt le glapissement d’un renard