Page:Le Bon - Psychologie de l’Éducation.djvu/168

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bliques grecques. Le luttes de Cicéron, Catilina, etc., n’étaient pas des luttes de principes, comme celles qui nous divisent aujourd’hui, mais des rivalités d’ambition personnelle.

Quant à la prétendue liberté des républiques grecques, il faut avoir aussi peu pénétré les choses de l’histoire que le font beaucoup d’historiens pour croire à la liberté de la Grèce antique et la vanter. Jamais divinité tyrannique ne tint ses adorateurs plus profondément pliés sous son joug que ne le furent les peuples les plus civilisés de l’antiquité grecque et latine sous la main de fer de la coutume.

L’État, c’est-à-dire le faisceau de lois, de traditions et d’usages dont il se constituait le gardien, était tout, et l’individu rien. Aucune puissance n’eût pu sauver le téméraire assez audacieux pour essayer de toucher à ce dépôt sacré. Eût-il possédé la sagesse de Socrate, le peuple entier se serait dressé immédiatement contre lui. L’empire des morts sur les vivants était alors tout-puissant. De ce que nous nommons la liberté, l’homme n’avait pas même l’idée. Que les gouvernements s’appelassent aristocratie, monarchie, démocratie, aucun d’eux ne tolérait la liberté individuelle, et il est facile de comprendre qu’avec l’étroite solidarité nécessaire aux nations qui voulaient rester puissantes, nul ne pouvait la tolérer. L’antiquité grecque ne connut ni la liberté politique, ni la liberté religieuse, ni la liberté de la vie privée, ni celle des opinions, ni celle de l’éducation, ni liberté d’aucune sorte. Rien dans l’homme, ni le corps, ni l’âme, n’était indépendant. Il appartenait tout entier à l’État, qui pouvait toujours disposer de sa personne et de ses biens à son gré.