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seuls de cette étude, comme ceux de toutes les langues, sont difficiles.

Il faut la commencer dès l’enfance, en même temps que la lecture et l’écriture, mais d’une façon diamétralement opposée à celle qui s’emploie aujourd’hui.

Elle doit s’enseigner par l’expérience, en substituant aux raisonnements effectués sur des symboles, l’observation directe de quantités qu’on peut voir et toucher. Ce qui rend si difficile l’instruction mathématique pour l’enfant, c’est l’indéracinable habitude latine de toujours commencer par l’abstrait sans passer d’abord par le concret.

Si l’ignorance de la psychologie infantile était moins universelle et moins profonde, tous les pédagogues sauraient que l’enfant ne peut comprendre les définitions abstraites de grammaire, d’arithmétique ou de géométrie, et qu’il les récite comme il le ferait pour les mots d’une langue inconnue. Seul le concret lui est accessible. Quand les cas concrets se seront suffisamment multipliés, c’est son inconscient qui se chargera d’en dégager les généralités abstraites.

Donc les mathématiques doivent, à leur début surtout, s’enseigner expérimentalement, car, contrairement à l’idée courante, ce sont des sciences expérimentales. C’est une opinion que j’ai été heureux de voir défendre par un illustre mathématicien, M. Laisant :

Je considère, dit-il, que toutes les sciences sans exception sont expérimentales au moins dans une certaine mesure. En dépit de certaines doctrines qui ont voulu faire des sciences mathématiques une suite d’opérations de pure logique reposant sur des idées pures, il est permis d’affirmer qu’en mathématiques aussi bien que dans tous les autres domaines scientifiques, il n’existe pas une notion, pas une idée qui pourrait pénétrer dans notre cerveau sans la contemplation préalable