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jeunes gens qui se serait tournés naturellement vers les professions productives.

Pour la médecine, il y avait 590 docteurs en 1875, 591 en 1891, avant que la loi ait pu produire ses effets, et 1 202 en 1897[1].

… À l’École des langues orientales, le nombre des élèves a décuplé en 14 ans, passant de 38 à 372. Je vous demande si ces jeunes gens, qui vont prendre là quelques notions de persan, de grec moderne, d’arménien, d’arabe ou de javanais, le font parce qu’ils seront consuls, drogmans, professeurs, traducteurs, ou parce qu’ils se fixeront dans le pays dont ils auront commencé d’apprendre la Iangue ; non, c’est parce qu’ils cherchent la dispense de deux ans de service militaire.

… À l’École des Beaux-Arts, vous voyez le même phénomène d’afflux artificiel se produire : de 586 candidats à l’entrée, en 1890-1891, nous passons à 830 en 1896-1897 ; et, à la sortie, il y avait 20 dispensés en 1890, et, en 1897, il y en avait 78.

… À l’Institut agronomique, la situation est presque aussi extraordinaire qu’à l’École des langues orientales. L’Institut agronomique forme des ingénieurs agronomes, et je ne crois pas que notre agriculture ait besoin d’un nombre infini d’ingénieurs, elle a surtout besoin de gens qui apprennent l’agriculture par la pratique, il y avait 32 candidats à l’Institut agronomique à l’entrée en 1876 ; et en 1893, peu de temps après le vote de la loi militaire, il y en avait 348 ; et en 1896, il y en a encore 312.

… À l’École Centrale, phénomène analogue en 1889, avant l’application de la loi militaire, il y avait 376 candidats, et en 1896 ce chiffre monte à 721. Et je vous demande si notre industrie a, d’après les chiffres que vous savez, profité en quoi que ce soit de cet afflux vers les écoles spéciales[2].

Le même auteur donne des chiffres analogues pour les écoles dites commerciales, écoles de théorie pure et dont le diplôme confère également la dispense. Le

  1. L’augmentation est analogue pour les docteurs en droit. Il y en avait 117 par an en 1889 et 446 en 1899, d’après le rapport de M. Raiberti.

    « La dispense, telle que la loi de 1889 l’a comprise, écrit cet auteur, abaisse donc la valeur des examens ou le niveau d’entrée dans les grandes écoles. Elle encombre les carrières libérales et elle écarte des affaires, du commerce et de l’industrie, un grand nombre de jeunes gens qui y auraient réussi et qui échoueront ailleurs. Elle frappe donc le pays dans les forces vives de sa production. »

  2. Enquête, t. II, p. 89. Max Leclerc, chargé de missions scientifiques par le Gouvernement.