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XLI

La mère dénaturée


Yvona Coskêr était entrée vers l’âge de dix-huit ans au service du seigneur de Kerham. C’était une fille jolie. La beauté, hélas ! est souvent un don funeste. Le seigneur de Kerham, un jour, ayant trouvé Yvona, seule à la cuisine, s’approcha d’elle et lui dit :

— La comtesse, ma femme, est déjà sur le retour. Si tu consens à devenir ma douce maîtresse, Yvonaïk, je te donnerai à ma mort la moitié de mes biens.

La malheureuse se laissa tenter. Elle devint la maîtresse du seigneur de Kerham.

Elle eut de lui cinq enfants bâtards.

Sur l’ordre du seigneur, elle les étouffait à mesure, et lui-même allait les planter[1] dans un petit bois, non loin du manoir.

Elle se trouva enceinte pour la sixième fois. Sa grossesse fut pénible. Une nuit qu’elle était au lit et ne pouvait fermer l’œil, elle se dressa tout à coup sur son séant, épouvantée.

  1. Le mot enterrer (interri) ne s’emploie en breton que s’il s’agit d’un ensevelissement en terre bénite. — [L. M.].