Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/297

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l’individu dont on veut la mort. Il importe qu’il soit bien en évidence, qu’il attire l’attention, qu’il tente la curiosité. On le dispose, par exemple, au milieu d’un sentier ou sur l’aire d’une maison. Votre ennemi le ramasse, croyant avoir trouvé une bourse pleine ; il le palpe, l’ouvre. C’est assez. Il mourra dans les douze mois[1].

(Communiqué par François le Roux. — Rosporden.)

Il est un moyen encore plus infaillible. C’est d’aller vouer (gwestla) celui que l’on hait à saint Yves-de-la-Vérité[2].

  1. Le jeteur de sorts peut aussi vous donner une pièce de deux liards percée ; il suffit de la glisser, étant à jeun, le dimanche à la messe dans la poche de la personne que l’on veut faire mourir.
  2. La chapelle de Saint-Yves-de-la-Vérité. — En face du quai de Tréguier, de l’autre côté du Jaudy, sur une gracieuse éminence tapissée d’ajonc et de bruyère, s’élevait naguère une petite chapelle sous le vocable de saint Sul. Elle appartenait aux seigneurs du Verger, de la famille de Clisson, qui lui adjoignirent vers le XVIIIe siècle un ossuaire en granit destiné à leur servir de sépulture familiale. La chapelle tomba en ruines, mais l’ossuaire lui survécut. On y entassa les statues de saints demeurées sans abri. Parmi elles se trouvaient deux images de saint Yves, dont l’une, très ancienne, passait aux yeux du peuple pour être plus particulièrement celle de saint Yves-de-la-Vérité. Saint-Yves-de-la-Vérité devint peu à peu, à l’exclusion de tout autre thaumaturge, le patron de cet ossuaire, transformé en oratoire. C’est là qu’on alla désormais invoquer sa justice.

    Aujourd’hui l’ossuaire même a disparu. Il a été rasé ; voici à quelle occasion : un cultivateur, resté célèbre dans la région sous le nom de « crucifié » de Hengoat, fut trouvé assassiné et