Page:Le Braz - La légende de la mort en Basse Bretagne 1893.djvu/302

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irons à la Roche-Derrien vendre la vache rousse. C’est la « foire du chaume » (foar-ar-zoul), nous en trouverons peut-être un bon prix.

La vache rousse fut, en effet, bien vendue. Trois cents écus sonnants, sans compter les arrhes.

Comme Louiz et Fanchi s’en revenaient vers Caouennek, l’apprenti dit au maître :

— À votre place, je ne donnerais pas cet argent à Marie Bénec’h, en une seule fois. Je le ramasserais dans un tiroir et je ne m’en séparerais qu’au fur et à mesure des besoins du ménage.

— C’est une heureuse idée, répondit Fanchi, qui n’avait jamais pensé à cela.

Rentré chez lui, il mit les trois cents écus, rangés en plusieurs piles, dans une grosse armoire de chêne dont il fourra la clef sous son traversin.

Mais son manège n’avait pas échappé à l’œil de Marie Bénec’h. Dès qu’elle entendit ronfler son mari que cette journée de foire avait harassé, elle se leva discrètement, déroba la clef, courut à l’armoire, et fit râfle de l’argent.

Qui fut bien attrapé le lendemain ? Ce fut Fanchi, le forgeron.

Ses soupçons se portèrent aveuglément sur son apprenti.

— Louiz, s’écria-t-il, pâle de colère, j’ai suivi ton conseil. Voilà ce qui m’en revient. Rends-moi mes trois cents écus.

— Je ne les ai pas pris.

Tu nies ? Soit. Tu vas de ce pas m’accompagner à Saint-Yves-de-la-Vérité !