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ceux de S. Malo ; Du Pas, en son Catalogue des EE. d’Aleth et de S. Malo, à la fin de son Histoire Genealogique des Illustres Maisons de Bretagne.


ANNOTATIONS.

L’ÉVÊCHÉ D’ALETH TRANSFÉRÉ À SAINT-MALO (A.-M. T.).

PRis l’invasion normande, Aleth avait essayé de se rétablir ; elle s’était construit une cathédrale qui, d’après des fouilles récentes, était pour l’époque une église de dimensions notables. Mais en ce temps de guerres fréquentes, où l’on redoutait toujours, même de

la part de ses voisins, quelque agression imprévue, le rocher d’Aaron avait sur la cité d’Aleth (1) un double avantage. D’abord c’était une île hérissée de rocs abrupts (car le Sillon n’était pas encore formé), d’un abord presque impossible et d’une défense facile ; Aleth, simple presqu’île, était très abordable du côté du Sud. En outre, Aleth n’avait point de reliques célèbres ; l’île d’Aaron au contraire, ou plutôt l’île Saint-Malo, gardait dans son sanctuaire les os vénérés du fondateur du siège épiscopal. Aussi, tandis que les habitants se groupaient de plus en plus nombreux dans l’île Saint-Malo autour des saintes reliques, la cité d’Aleth se dépeuplait ; et pendant que son port devenait désert, navires, mariniers, marchands, foisonnaient et prospéraient dans l’île d’Aaron.

L’église de l’île était tombée entre les mains de possesseurs laïques qui vers la fin du xie siècle, pour se soustraire à l’excommunication, la remirent à Benoît évêque d’Aleth (de 1090 environ à 1110 ou 1111). Comme tous les évêques d’alors celui-ci la donna à des moines, à charge d’y entretenir régulièrement le service religieux. C’est l’abbaye de Marmoutiers qui accepta cette donation et cette charge, et établit là un prieuré.

Rien de plus légitime (étant donné l’usage et le droit de l’époque) que cette donation et cette acceptation qui furent d’ailleurs ratifiées en 1109 par une bulle de Pascal II, et plus tard par des actes authentiques des deux successeurs immédiats de l’évêque Benoît.

Tel ne fut pas cependant l’avis d’un personnage bien recommandable par ailleurs, Jean de Chatillon, lui aussi évêque d’Aleth c’est celui dont Albert Le Grand a donné l’histoire sous le titre de Vie de saint Jean, dit de la Grille (le 3 février). Il aurait pu entrer en négociations avec les moines ; et si on leur eût offert un dédommagement, un échange convenable, ils n’eussent probablement pas hésité à céder l’église de Saint-Malo en l’Ile. L’évêque recourut immédiatement et directement au pape Lucius II qui remit aux évêques de France le jugement de l’affaire l’épiscopat français reconnut le bon droit des moines (1144). Le très entêté mais très pieux évêque d’Aleth était l’ami de saint Bernard ; sur son conseil il alla à Rome trouver le pape, mais n’obtint rien en revenant il se rendit à Clairvaux pour recevoir les consolations et les conseils de son ami, mais l’illustre abbé était absent ; ses moines accueillirent l’évêque breton comme leur bienheureux père l’aurait fait lui-même, et Jean de Chatillon partit chargé de trois lettres très élogieuses dans lesquelles ils le recommandaient chaleureusement à saint Bernard (2). Malgré la haute autorité dont celui-ci jouissait dans toute l’église, l’abbé de Clairvaux n’aurait probablement rien obtenu de Lucius II pour l’évêque d’Aleth, mais ce pape mourut le 25 février et le 4 mars suivant Eugène III occupait le trône pontifical or il avait été moine de saint Bernard à l’abbaye de Clairvaux et gardait pour son abbé l’affection la plus tendre, la vénération la plus profonde. À la demande d’un avocat aussi zélé le nouveau pape consentit à reprendre l’affaire ; il la confia à l’archevêque de Bordeaux et aux évêques d’Angoulême et de Chartres, en mandant (1) Aujourd’hui Saint-Servan.

(2) L’un des moines signataires de ces lettres était le prmee Henri fils du roi de France Louis VII (le Jeune). D. Lobineau.

V. DES S. 40