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Page:Le Grand Meaulnes.djvu/312

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face que de profil, elle m’a dit d’une voix brève :

— Vous m’amusez beaucoup. Vous me rappelez un jeune homme qui me faisait la cour, autrefois, à Bourges. Il était même mon fiancé…


Cependant, à la nuit pleine, sur le trottoir désert et mouillé qui reflète la lueur d’un bec de gaz, elle s’est approchée de moi tout d’un coup, pour me demander de l’emmener ce soir au théâtre avec sa sœur. Je remarque pour la première fois qu’elle est habillée de deuil, avec un chapeau de dame trop vieux pour sa jeune figure, un haut parapluie fin, pareil à une canne. Et comme je suis tout près d’elle, quand je fais un geste mes ongles griffent le crêpe de son corsage… Je fais des difficultés pour accorder ce qu’elle demande. Fâchée, elle veut partir tout de suite. Et c’est moi, maintenant, qui la retiens et la prie. Alors un ouvrier qui passe dans l’obscurité plaisante à mi-voix :

— N’y va pas, ma petite, il te ferait mal !

Et nous sommes restés, tous les deux, interdits.


Au théâtre. — Les deux jeunes filles, mon amie qui s’appelle Valentine Blondeau et sa sœur, sont arrivées avec de pauvres écharpes.

Valentine est placée devant moi. À chaque instant elle se retourne, inquiète, comme se demandant ce que je lui veux. Et moi, je me