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LE MÉNESTREL

rendu de là à Sydney, où il a annoncé plusieurs concerts. Nos lecteurs savent déjà que M. de Kontski a l’intention de donner quelques concerts à Paris au printemps prochain.

— Les nouvelles qu’on reçoit de la santé de M. Carlos Gomes sont loin d’être rassurantes sur l’état du compositeur. Le gouvernement brésilien, outre qu’il ne le laisse manquer de rien, a assigné une pension à ses fils ainsi qu’une dot à sa fille lorsque celle-ci jugera à propos de prendre un époux.

PARIS ET DÉPARTEMENTS

À l’Opéra, c’est M. Noté qui a tenu le rôle d’Hamlet, mercredi dernier, en place de M. Renaud, indisposé. M. Noté, prévenu à la dernière heure seulement, sans une répétition, sans même un raccord, a chanté l’ouvrage d’Ambroise Thomas, et, par ses applaudissements, le public lui a montré qu’il s’était tiré de cette très lourde tâche tout à son avantage. Mlle Berthet, faisant sa rentrée dans Ophélie où elle s’est montrée charmante, et Mlle Subra, exquise dans la Fête du Printemps, ont retrouvé le succès auquel elles sont habituées. Mlle Dufrane abordait pour la première fois le rôle de la reine.

M. Gailhard, en ce moment à Biarritz, rentrera à Paris à la fin de cette semaine.

— Les travaux entrepris à l’Opéra-Comique devant être, maintenant, très certainement achevés pour permettre de rouvrir à la date du 15, M. Carvalho a dû partir, hier samedi, pour Munich, où il va assister à une des représentations de Don Juan qui s’y donnent en ce moment, M. Carvalho sera de retour à Paris à la fin de cette semaine.

M. et Mme Massenet sont rentrés à Paris où ils ne comptent séjourner que quelques jours seulement. M. Massenet a profité de son passage pour arrêter avec M. Carvalho différents détails relatifs à Cendrillon.

— Vendredi soir, Mlle Van Zandt a signé avec M. Carvalho un engagement au terme duquel elle donnera, du 20 novembre au 20 janvier, une série de représentation de Lakmé, dont elle fut l’inoubliable créatrice, et de Manon, qu’elle chantera pour la première fois.

— À l’occasion de diverses expositions récentes, le Journal officiel a enregistré plusieurs distinctions académiques parmi lesquelles nous relevons les suivantes : officier de l’instruction publique : M. Poulalion, éditeur de musique à Paris ; officiers d’académie : MM. Depas, artiste dramatique à Bordeaux ; Duclos, directeur de l’orphéon du 1er canton de Bordeaux ; Florus-Blanc, professeur au Conservatoire de Bordeaux ; et Gauvin, éditeur de musique à Paris. — Mentionnons en même temps quelques autres nominations d’officiers d’académie qui remontent déjà à quelques semaines : MM. Henri-Louis Martin, professeur de musique aux écoles normales, Jean Ajon, professeur de musique au lycée d’Alais, Léon Mérignac, professeur de musique au lycée d’Angoulême, et Jacques Périlhou, professeur de musique au lycée de Mont-de-Marsan.

M. Guiffrey, administrateur des Gobelins, a livré à la Comédie-Française, sur l’ordre du ministre des beaux arts, une admirable tapisserie des Gobelins exécutée sur la composition du peintre Joseph Blanc. Cette tapisserie, de plus de cinq mètres de haut sur plus de trois mètres de large, représente le Couronnement de Molière, un jour de cérémonie. Les deux personnages principaux entourant le buste de Molière sont Tartuffe et Dorine. Pour Tartuffe, l’artiste a pris modèle M. Silvain dans ce rôle ; pour Dorine, M. Blanc avait fait le portrait vivant et frappant de la pauvre Céline Montaland. L’administrateur de la Comédie saisira la première occasion de montrer ces œuvres de notre manufacture nationale de tapisserie.

M. Prince, premier prix de comédie aux derniers concours du Conservatoire, vient d’être engagé à l’Odéon.

— Le pianiste portugais Viana da Motta, que le public parisien n’a sans doute pas oublié, vient de publier un livre consacré au fameux chef d’orchestre Hans de Bülow. Celui-ci n’était pas toujours l’excentrique qu’il se plaisait à paraître ; il avait, on le sait, un haut sentiment de l’art. M. Viana da Motta cite de lui quelques réflexions intéressantes. À propos de la justesse chez les virtuoses : « On peut jouer juste, bien et d’une façon intéressante. Ne jouez donc pas d’une façon si intéressante que cela cesse d’être bien, et ne jouez pas si bien que cela cesse d’être juste… » Et à propos de Mozart : « Ce n’est pas impunément que Mozart était à moitié Italien. On le joue, non comme s’il était de Salzbourg, mais comme s’il avait vu le jour à Stockholm. Cela est trop glacial, trop mort. Le ton est trop mince, trop enfantin. Étudiez ses opéras, ou jouez ses sonates pour piano et violon : chez Mozart, et même dans ses sonates pour piano, il y a toujours un processus dramatique. Chaque thème de Mozart est une individualité. »

— À la Villa des Fleurs, à Aix-les-Bains, la première représentation de Le Roi l’a dit, le délicieux ouvrage de Léo Delibes, a dépassé comme succès tout ce que l’on pouvait attendre. Interprétation parfaite avec Mme Landouzy, MM. Soulacroix et Isnardon, très jolie mise en scène de M. Nerval, et exécution musicale très délicate, grâce aux soins de M. Luigini.

— Au Cercle d’Aix-les-Bains, le succès de la Navarraise avec sa remarquable interprète, Mme de Nuovina, MM. Bouvet et Maréchal, s’accentue de plus en plus. On a déjà donné trois représentations devant des salles combles et complètement subjuguées.

— De notre confrère Nicolet, du Gaulois : « Le bruit court que la municipalité marseillaise, désireuse de rendre à notre école communale de musique sa réputation d’autrefois, songerait à lui restituer le titre de « succursale du Conservatoire de Paris, qu’elle a porté de 1842 à 1872 ; c’est grâce, en effet, à l’enseignement supérieur donné pendant ces trente ans que plusieurs élèves sont devenus, tels que Boudouresque, Maurel, Pujol, etc. des artistes en renom à Paris et à l’étranger. »

— Décentralisation. Le théâtre d’Amiens annonce, pour cet hiver, la première représentation de Françonnette, opéra-comique en quatre actes, tiré d’un conte de Jasmin par MM. J. Goujon et A. Bernède, musique de M. R. Lavello. Les mêmes auteurs firent jouer l’année dernière, à Rouen, une Marie Stuart.

— Au Casino municipal de Bagnère-de-Bigorre, très brillante réussite de la Navarraise, avec Mlle Lyvenat dans le rôle de l’héroïne de MM. Massenet, Claretie et Cain. L’exécution musicale, très soignée par M. Ch. Haring, a été parfaite. Trois jours après avait lieu au Parc, toujours sous la très artistique direction de M. Haring, un superbe festival Massenet, au cours duquel on a applaudi et bissé l’ouverture du Cid, le ballet du Mage, des suites sur Manon, sur Hérodiade, le ballet du Roi de Lahore, Sous les tilleuls des Scènes alsaciennes, l’Hyménée d’Esclarmonde et la Parade militaire.

— On nous écrit de Cabourg : Dimanche, M. Bourdeau avait organisé une messe en musique en l’honneur de Faure, de passage à Cabourg, dont les œuvres remplissaient le programme de cette belle et pieuse cérémonie. M. Alvarez, un brillant élève du maître, amateur doué d’une belle voix de baryton, a interprété dans un style large l’O Salutaris. M. Jean Rondeau a montré l’ampleur de son talent et de sa voix dans le Sancta Maria, accompagné au violon par M. Hayot et à l’orgue par M. J. de Santesteban, et Mme Smith a fort religieusement dit l’Ave Maria. On a terminé par le Crucifix, interprété par Mmes Smith, Calafa, Kerckhoff, MM. Rondeau, Alvarez et Vieuille, et accompagné par les artistes de l’orchestre du Casino. L’orgue était tenu, durant la messe, par MM. J de Santesteban et Deslandes. Vendredi, au concert du Casino, M. J. Faure fut également l’objet d’une ovation des plus chaleureuse de la part du public, après l’interprétation de son Sancta Maria par M. Jean Rondeau. Toute la salle a confondu dans de chauds applaudissement le grand maître et son interprète.

— La saison thermale de Bagnoles-de-l’Orne bat son plein. Au concert donné le 22 août, parmi les productions de nos meilleurs compositeurs tels que Massenet, Godard, Gounod, Ch. René, F. Thomé, grand succès pour Ch. Balanqué dans la mélodie les Enfants, de Massenet, et pour M. Guérin dans Aube d’amour, de Révillon.

— À l’église de Saint-Paul-en-Cornillon, sur la Loire, très jolie messe en musique organisée par M. J. Vincent, dont on a exécuté plusieurs compositions nouvelles. Très gros effet pour le chœur à l’unisson de Reunaldo Hahn, sur les vers de Racine.

NÉCROLOGIE

La semaine dernière est mort à la Garenne-Colombes, après deux années d’une maladie douloureuse, Mlle Marie Anna Papot, professeur de solfège au Conservatoire dont l’enseignement était très justement apprécié, rue du Faubourg-Poissonnière, et qui avait publié un Solfège manuscrit, 27 leçons à changement de clefs. De relation très agréables, Mlle Papot, qui n’avait que quarante-deux ans, sera fort regrettée non seulement de ses élèves, mais encore de tous ceux qui l’ont connue. Minée par un mal qui ne pardonne pas, Mlle Papot avait dû depuis longtemps confier la conduite de sa classe aux soins de sa répétitrice, Mlle Robert.

— On annonce le décès de Mlle Jeanne Monnier, sujet-mime à l’Opéra, morte à vingt-huit ans. Cette jeune et consciencieuse artiste avait créé le rôle de la Reine des Tziganes dans les Deux Pigeons, d’André Messager, en 1886. — M. Juan Escalas, un modeste mais très distingué musicien, qui fut un flûtiste remarquable et composa un grand nombre de morceaux pour orchestre et bande militaire, vient de mourir à Barcelone, en Espagne. Il fit longtemps partie de la musique municipale, où il n’a pas été remplacé. C’était un brave et excellent homme, qui laisse d’unanimes regrets.

A. G. B.

— À Reichenhall, en Bavière, s’est éteint à l’âge de soixante-quinze ans le compositeur et pianiste Rodolphe Schachner, qui était fort connu et estimé comme professeur de piano à Londres et à Vienne. Parmi ses compositions assez nombreuses mais peu répandues, son oratorio le Retour d’Israël de Babylone a été joué assez souvent en Allemagne et en Angleterre et y a fait connaître le nom de son auteur.


Henri Heugel, directeur-gérant.


AVIS AUX PROFESSEURS. — Belle salle pour auditions, cours et leçons, matinées et soirées. Location au mois et à la séance. — S’adresser Maison musicale, 39, rue des Petits-Champs. Paris.