Aller au contenu

Page:Le Mierre-Oeuvres-1810.djvu/250

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Quel es-tu, pour juger des moeurs de ma patrie,

Pour vouloir renverser et plonger dans l'oubli [785]

Sur des siècles sans nombre un usage établi ?

Crois-tu déraciner de ta main faible et fière

Cet antique cyprès qui couvre l'Inde entière ?

Le Général

J'y porterai la hache. Et l'effort sera vain.

Le temps autour de l'arbre a mis un triple airain. [790]

Le Général

Dis autour de ton coeur : plus l'usage est antique,

Plus il est temps qu'il cesse, et plus, coeur fanatique,

Tu devrais commencer à sentir les remords

Qu'avant toi tes pareils n'ont point eus sur ces bords.

Barbare ! De quel nom faut-il que je te nomme ? [795]

Toi prêtre ! Toi bramine ! Et tu n'es pas même homme.

La douce humanité, plus instinct que vertu,

Ce premier sentiment qui ne s'est jamais tu,

Né dans nous, avec nous, et l'âme de notre être,

Ce qui fait l'homme enfin, tu peux le méconnaître ? [800]

De quel souffle, en naissant, fus-tu donc animé ?

Quel monstre ou quel rocher dans ses flancs t'a formé ?

Tu n'as donc, malheureux, jamais versé de larmes,

De l'attendrissement jamais senti les charmes ?

Il m'a fallu venir sur ces bords révoltants, [805]

Pour t'apprendre qu'il est des coeurs compatissants.

Je te rends grâce, ô ciel ! Dont la voix tutélaire