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enthousiasme

Le jour suivant, sa mère ne quitta pas la cuisine, et les odeurs de sarriette et de beignes se mêlèrent amicalement dans la maison. Le soir vint. À neuf heures, Guy sonnait et il annonça en entrant que la lune était levée et que c’était la plus belle des nuits de Noël. Les autres excursionnistes n’avaient pas encore démarré. Un copain frapperait en passant pour les avertir.

Car si cette piste était sûre et sans danger, personne ne commettait la sottise de partir solitaire pour franchir le soir pareille montagne. Pour Yvette et Guy, le ski semblait un sport de tout repos, c’était une seconde nature, mais tout de même, il fallait toujours prévoir qu’on pouvait se fouler une cheville ou se casser une jambe !

La caravane partit à neuf heures et demie. La piste descendait en droite ligne, rapide, et traversait un ruisseau, puis gravissait un flanc très abrupt. Mais ensuite, il n’y avait plus qu’à se laisser descendre dans le plus pittoresque, le plus merveilleux des sentiers. La neige et la lune rendaient la nuit très claire. On entendait parfois une exclamation, mais les skieurs avançaient sans parler. Dans l’étroite piste, à la queue leu leu, une conversation était difficile. Tout de même Guy et Yvette se détournaient souvent pour échanger une réflexion. Tous les deux connaissaient le terrain dans ses moindres replis, et ils savaient que sauf lorsqu’il faudrait redescendre vers Sainte-Marguerite, aucune pente n’était rapide, ou dangereuse. Ils marchaient longtemps dans un défilé serré entre deux montagnes couvertes d’épaisse forêt. C’était sauvage, et beau.