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Page:Le Sylphe - Poésies des poètes du Dauphiné, tome 1, 1887.djvu/149

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POÉSIES DES POÈTES DU DAUPHINÉ 143 O Mort ! tu n'as point de caprice, Tu fais à tous le même sort ; Et puisque la Douleur me mord, Je vais à toi, consolatrice ! Mais avant que de m'en aller Dans le sein de la grande mère ; Dans une boîte funéraire Avant qu'on vienne m'emballer ; Avant que j'aille m'isoler Au fond d'un tombeau solitaire, Où, pour jamais, je vais me taire, — N'ai-je pas le droit de parler ? Devant les foules amassées, Je ne mourrai point maugréant. Mais avant qu'en ce trou béant S'endorment mes douleurs passées, Avant qu'elles soient effacées Par le doigt brutal du néant, Je veux, ainsi qu'il est séant, Sur vélin coucher mes pensées. ... Je songe, en ce dernier moment, Deuil suprême, à ma pauvre mère, Elle ne me fut oncque amère Et me berça si doucement. O cœur pur comme un diamant, Elle n'avait que moi sur terre, Et, ne songeant qu'à me complaire, Fut tout amour et dévouement. Or, pourtant, quelle chose infâme ! Combien, dans ce monde imparfait, Loin du juste qu'elle rêvait, Le Destin fait fléchir notre âme !