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Page:Le Sylphe - Poésies des poètes du Dauphiné, tome 1, 1887.djvu/154

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148 LE SYLPHE Ainsi, je mourrai sans avoir Possédé le cœur d'une femme. Sans avoir, avec tant de flamme, Chauffé ce marbre ! ô désespoir ! Sans avoir senti le dictame Des baisers calmant mon douloir. Sa griffe a déchiré mon âme. . . — Mais, vengeance! vous allez voir! Lorsque la Mort, la Mort divine Venant à son adorateur, Sur mon triste front qui s'incline Aura posé son doigt vainqueur, Pour moi n'invoquez point en chœur, Amis, la fauve Libitine. Sans retard ouvrez ma poitrine, De vos mains m'arrachez le cœur! Arrachez-le vivant encore, Saignant et palpitant d'amour, Et portez-le sans perdre un jour A l'impassible que j'adore. En ce cœur elle fit éclore Le mal qui me perd sans retour. Je veux, comme un cruel vautour, Qu'elle le prenne et le dévore! Mon âme en elle passera, Toute ardente et désespérée. En mes désirs fous égarée, A son tour elle gémira. A l'amour qui me déchira, En proie elle sera livrée! L'insensible se sentira De mon feu mortel dévorée.