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Page:Le Sylphe - Poésies des poètes du Dauphiné, tome 1, 1887.djvu/228

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3o LE SYLPHE ombre de doute et de mélancolie — inévitable avec la noble passion qui lui a inspiré la deuxième partie, Amorf Là, le poète nous confie ses amours — et ses désespérances. Il nous parle de sa Marguerite qui n'est plus; il nous chante ses rêves perdus et ses illusions envolées, en d'admirables vers, que nous avons lus et appris et où nous avons retrouvé notre souffrance passée. Dans la troisième partie, Patria! il retrace en passant les vieilles épopées et évoque quelques nobles souvenirs et quelques grandes gloires de la patrie. L'allure virile des vers, surtout des ïambes, et la façon dont ils sont forgés et martelés font deviner le futur auteur de La Chaîne rouge. Enfin, dans la quatrième partie, Varia, il fait une trinité des trois grandes pensées qui embrasent son âme de poète, Naturaf Amorf Patria ! Et iLtermine par une magnifique pièce qui, quoique un peu longue, se lit sans fatigue jusqu'au bout. Il s'adresse aux trois villes où il a vécu : Valence, Grenoble, Apt. C'est à Grenoble, cherchant à oublier ses amours brisées, qu'il apprit à aimer la France et la Liberté ! Fière cité, Grenoble, ô grande ville amie, C'est toi qui fis passer sur mon âme endormie Ce rayon de soleil I C'est là que nous l'avons connu, que nous avons vécu ensem ble la même souffrance — qui a fait de nous deux amis. Après dix ans est l'œuvre d'un vrai poète, : aussi la recomman dons-nous chaudement à tous nos lecteurs. On est si heureux, en ces temps d'indifférence religieuse et de poésie décadente et naturaliste, de retrouver ces sentiments qui reposent et consolent, et ces forces vives de la poésie qui régenèrent et réchauffent. Jehan ÉCREVISSE. La Chaîne rouge (i fr.), d'Auguste Gillouin, est un de ces « beaux livres de haulte gresse » que l'on se plaît à « fleurer, sentir et estimer », comme dit l'aïeul Rabelais. Et de fait, par ces temps de pessimisme à outrance, c'est une bonne fortune vraiment exceptionnelle que de rencontrer quelques pages assez énergiquement pensées pour nous reposer un peu des fadasse- ries a la mode. Au milieu de toutes les productions hypocondriaques dont tant de muses rachitiques ou névrosées viennent assaillir le Parnasse, je me suis pour mon compte senti brusquement revi vre à pouvoir savourer un peu de cette « substantiflque mouelle » si rare de nos jours. J'ai cru retrouver dans les vers incisifs et sonores de ce drame (que j'appellerais plutôt une violente satire) un reflet de cette rude et vigoureuse poesie antique dont Lucilius