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Page:Le Sylphe - Poésies des poètes du Dauphiné, tome 1, 1887.djvu/241

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REVUE DES ÉCRIVAINS DAUPHINOIS 4.3 Hélas! hélas! « Où sont les neiges d'autan? » Il nous arrivera de les regretter bien des fois ! Grenoble, 9 mars 1885. C. NIEMAND. L'ÉCOLE A Marie R... Il y a déjà bien longtemps que nous l'avons quittée, cette chère école où nous nous rendions si joyeusement. Depuis, le courant de la vie nous a entraînées l'une et l'autre, et je me retrouve aujourd'hui loin du pays natal, loin des miens et loin de toi. Autour de moi, un essaim de fillettes, vives et gaies comme nous l'étions à leur âge, prend ses ébats, je m'efforce d'être pour elles ce que notre maîtresse d'autrefois fût pour nous; mais je n'y parviens qu'imparfaitement, car où puiser sa douceur, sa bonte, son ind ulgence ? Toi, plus heureuse, tu es restée « là-bas », près de ta mère. Aux vacances prochaines, je t'y retrouverai et nous recommen cerons ensemble les promenades d'autrefois et les interminables causeries où l'on rencontre tant de « t'en souviens-tu ? » Oui, t'en souviens-tu de l'école avec sa cour, son grand portail et ses deux amandiers? Les rosiers qui tapissaient sa façade; le jasmin où nous oubliions rarement de cueillir une fleur avant d'entrer à l'étude; le grand jardin où, deux privilégiées, nous passions nos récréations; et l'allée bordée de Tilleuls, dis-moi, t'en souviens-tu ? Te souviens-tu de notre classe d'autrefois, avec sa tapisserie sombre, ses boiseries sévères, son grand christ fixement impas sible, sa cheminée avec de banales statuettes religieuses en guise d'ornements, ses placards béants, ses grandes fenêtres? Oh! les fenêtres!. . . surtout celle qui donnait sur le pré, tu sais. . . elle était si près de notre table, de notre petite table où nous avons gribouillé tant de choses inutiles d'un air sérieux et convaincu ! Aussi, m'arrive-t-il souvent quand je vois une de mes élèves faire à sa compagne ce que nous appelions « une farce », de me détourner et de rire, puis de songer aux farces d'autrefois. Mais la réalité chasse vite le rêve, et je me retrouve bientôt au milieu d'un essaim de fillettes bruyantes, loin du temps où j'allais à l'école, loin des miens et loin de toi. Amélie NACHTIGALL.