Page:Le Testament de Jean Meslier - Tome 2, 1864.pdf/156

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même, qui ne faisoit aucun tort, ni aucun préjudice à Dieu, ni à personne, et qui auroit même été commise sans aucun mauvais dessein, et qui présentement ne mériteroit seulement pas un coup d’étrivières, un Dieu, dis-je, infiniment bon, infiniment sage auroit voulu, pour une telle prétendue faute, perdre tout le genre humain, priver tous les hommes de la grâce, les condamner tous à la mort, et leur faire souffrir, en punition d’une telle faute, toutes les peines et toutes les misères de cette vie, et avec cela les condamner encore à une reprobation et à une malédiction éternelle, pour un tel sujet ? Cela n’est nullement croïable. C’est faire injure à la souveraine bonté et à la souveraine sagesse d’un Dieu, d’avoir seulement ces pensées-là.

Si un prince, par exemple, se mettoit en fantaisie de vouloir perdre tous les peuples d’une province, pour une légère désobéissance d’un de ses sujets favoris, ou si un père de famille, qui seroit riche et puissant, et qui auroit bon nombre d’enfans, se mettoit en tête de vouloir les chasser tous de la succession de ses biens et les rendre tous misérables et malheureux, tout le tems de leur vie, pour la désobéissance et même pour une légère désobéissance d’un seul de ses enfans, ne diroit-on pas de ce prince et de ce père que ce seroient des insensés et des fous ? On auroit raison de le dire, car en effèt, il faudroit avoir perdu tout-à-fait la raison et tomber dans un excès de brutalité et de fureur, pour en venir jusques-là. Comment est-ce donc, qu’un Dieu et qu’un être qui seroit infiniment bon et infiniment sage, auroit pû tom-