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chages pour se garder de la rigueur de l’hiver et de la pluïe, passoient doucement les nuits sans jetter un seul soupir ; mais les soucis et les peines nous tourmentent, dit-il, dans notre écarlatte et nous piquent de cruels aiquillons, au contraireles autres dormoient d’un someil gracieux sur la dure.

L’auteur du Journal[1] historique raporte à-peu-près la même chose des hommes de ces prémiers tems-là. Heureux, dit-il, étoient les peuples qui vivoient sous l’Âge d’or, et dans cette innocence, dont parle le Poëte lorsqu’il dit :

L’Âge d’or commença, cet Âge ou de l’enfance
L’homme tant qu’il vivoit conservoit l’innocence,
Et, réglant ses projets sur la seule équité,
Joignit l’exactitude à la fidélité.
Les loix, que pour punir, l’on a depuis trouvées
N’avoient point sur l’airain encore été gravées,
Et, tous en sûreté, vivant sans intérêt,
On ignoroit les noms de juges et d’arrêt.

Mr. Pascal,[2] dans ses réflexions, témoigna assez clairement être de ce même sentiment, lorsqu’il marque que l’usurpation de toute la terre et les maux tous qui s’en sont ensuivis, ne sont venus que de ce que chaque particulier a voulu s’aproprier des choses, qu’il auroit dû laisser en commun. Le chien est à moi, disoient ces pauvres enfans, c’est-là ma place au soleil. Voilà, dit cet auteur, le commencement de l’image de l’usurpation de toute la terre. Platon, le divin Platon, voulant dresser une République, dont les

  1. Janvier 1710.
  2. Pascal, 331.