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THÉÂTRE DE LA RÉVOLUTION

GONCHON, avec empressement.

Prendre la Bastille !

Le peuple rit.
HOCHE.

Tu es un brave ! — Et nous, gens du faubourg, ne nous laissons pas damer le pion par la Montagne Sainte-Geneviève. Que Saint-Antoine ne fasse pas le fainéant, tandis que Saint-Jacques s’escrime des poings et du bâton ! Sonnez les cloches, battez le tambour, appelez les citoyens aux districts. — Aux électeurs et aux députés. Vous, citoyens, veillez sur l’Hôtel de Ville, empêchez qu’on ne nous prépare quelque traîtrise dans le dos ! chargez-vous des bourgeois ! Nous, nous allons museler la bête.

Il montre la Bastille.
La petite Julie est descendue avec sa mère, sur le pas de sa porte ; elle est grimpée sur une borne pour mieux voir, et regarde Hoche avec une insistance muette et passionnée. Hoche la regarde, et sourit.

Eh ! petite ! tu veux venir aussi ? tu en grilles d’envie ? — Elle lui tend ses mains frémissantes, en faisant signe que oui, sans parler. Eh bien, Viens ! — Il l’enlève et la met sur son épaule.

LA MÈRE.

Vous êtes fou ! Laissez-la ! L’emmener où on se bat !

HOCHE.

N’est-ce pas elle qui nous y envoie ? Voici notre porte-drapeau !

LA MÈRE.

Ne me l’enlevez pas !

HOCHE.

Eh ! venez aussi, la mère ! Personne ne doit rester dans les maisons aujourd’hui. Que le limaçon quitte sa coquille ! La ville tout entière sort de sa prison. Ne laissons rien par derrière. Ce n’est pas une armée en guerre, c’est une invasion.

LA MÈRE.

Ma foi, oui. Si on doit mourir, mieux vaut être tous ensemble.