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LES LOUPS

QUESNEL.

Je le ferais, en temps de paix ; mais ici, je ne puis décimer mes propres forces. D’Oyron gracié reste suspect. Verrat condamné, le doute règne partout. Et enfin, je ne puis me passer de Verrat. J’ai besoin de lui. — Écoute ! Tu entends le canon ?… C’est lui qui se bat en ce moment… Verrat condamné, il me manque la moitié de l’armée. Qui sait comme lui entraîner les hommes ? Ils ont pris Kostheim, ce soir. Par cette nuit glaciale, ils ont passé le Mein. Ils aiment ce diable poilu, qui leur fait casser la tête, et qui les mène au feu sous une bordée d’injures. Ils l’aiment pour cela. Il est maître de sa légion. Si on l’arrêtait, il y aurait une révolte. Ils ne me pardonneraient jamais.

TEULIER.

Gagne du temps, retarde l’exécution. Prétends qu’il te faut encore prolonger l’enquête. Préviens la Convention.

QUESNEL.

Impossible ! Le peuple, l’armée ont été affolés par la nouvelle. L’opinion est énervée et accuserait l’état-major. Quant à la Convention, il n’y faut pas compter. Verrat nous a été envoyé par les Jacobins. Il est ami de Fouquier, de Hébert ; le Journal de la Montagne, tous les aboyeurs du club sont pour lui.

TEULIER.

Silence à ces raisons indignes ! Quand on voit où est la justice, on l’impose aux partis. Tu risques ta tête à tout instant pour la patrie. Ne peux-tu l’exposer pour la justice ?

QUESNEL.

J’aime mieux ma patrie que la justice.

TEULIER.

Sépares-tu l’une de l’autre ? Ah ! ça, pourquoi crois-tu que nous nous faisons casser la tête ici ? Est-ce pour l’ambition de quelques Jacobins ? C’est pour la justice, Quesnel, que la nation s’est levée en armes. Le jour où elle la vio-