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la royauté, leur faisait subir sous ses yeux les plus cruels supplices.

Quant aux bas-reliefs compris dans les deux zones étroites qui, avec la bande d’inscriptions, se partageaient la surface des murs, les scènes qui s’y trouvaient retracées offraient plus de variété. Les unes représentaient des combats livrés à des ennemis de nations différentes, à en juger par la diversité des costumes, et des assauts donnés à plus de vingt forteresses, chacune accompagnée d’une courte inscription qui, très-probablement, en conservait le nom. Ces tableaux, où les ressources militaires de l’antiquité apparaissaient dans tous leurs détails, étaient animés par des guerriers combattant à pied et à cheval, avec la lance ou l’épée, et tenant au-dessus de la tête ces boucliers circulaires qu’ils présentaient à l’ennemi. On y voyait, en première ligne, des archers qui bandaient leur arc, décochaient leurs flèches derrière de grands boucliers posés à terre, et qui les dérobaient tout entiers aux coups de l’ennemi. Le roi présidait du haut de son char à neuf batailles différentes. Il foulait aux pieds de ses chevaux les mourants et les morts. Les cadavres décapités prouvaient que l’usage de trancher la tête aux vaincus était pratiqué par certains peuples bien avant les musulmans, qui, on le sait, décapitent leurs ennemis pour les priver du secours de l’ange qui doit les enlever au ciel par cette partie du corps. Au milieu de toutes ces scènes variées de combats et d’assauts figuraient aussi les files de prisonniers, parmi lesquels on reconnaissait, à certains signes caractéristiques, les tribus juives ; et, en effet, on sait que les Assyriens vainqueurs de la Judée emmenèrent les habitants en captivité vers Ninive et Babylone. À d’autres signes, on reconnaissait encore d’autres races, telles que les Arabes ou des nègres dont les têtes nues et les cheveux crépus, ainsi que les traits écrasés, ne laissaient aucun doute.

Bas-relief à Khorsabad (Ninive). — Dessin de M. E. Flandin.

À toutes ces scènes de combats ou de victoires se mêlaient les réjouissances. C’étaient des festins, des tables servies et de chaque côté desquelles étaient assis des convives élevant leurs verres et semblant porter des santés. Derrière leurs siéges, des gardes agitaient les chasse-mouches, des musiciens jouaient de la lyre, et des eunuques chargés du service remplissaient et apportaient les vases pleins de vin.

Comment ne pas penser, en voyant ces tables luxueuses entourées de buveurs, à cet interminable festin de cent quatre-vingts jours qu’Assuérus donna aux grands de son royaume dans son palais de Suze ? — Pendant ce repas, dit l’Écriture, au livre d’Esther, « ayant le cœur gai de vin, il commanda aux sept eunuques qui servaient devant lui de lui amener la reine Vasti, afin de faire voir sa beauté aux seigneurs de sa cour… » Les choses ne durent pas se passer ainsi à Ninive, car il est remarquable que l’on n’y retrouvait pas une seule figure de femme,